Aller au contenu

Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/423

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelquefois d’un vert clair cristallisé. Ces différences indiquent assez que la calamine, en général, est une pierre composée de différents minéraux, et que sa nature varie suivant la quantité ou la qualité des matières qui en constituent la substance : le zinc est la seule matière qui soit commune à toutes les espèces de calamine ; celle qui en contient le plus est ordinairement jaune ; mais on peut se servir de toutes pour jaunir le cuivre rouge ; c’est pour cet usage qu’on les recherche et qu’on les travaille, plutôt que pour en faire du zinc qui ne s’emploie que rarement pur, et qui même n’est pas aussi propre à faire du cuivre jaune que la pierre calaminaire : d’ailleurs, on ne peut en tirer le zinc que dans des vaisseaux clos, parce que non seulement il est très volatil, mais encore parce qu’il s’enflamme à l’air libre ; et c’est par la cémentation du cuivre rouge avec la calamine que la vapeur du zinc contenu dans cette pierre entre dans le cuivre, lui donne la couleur jaune et le convertit en laiton.

La calamine est souvent parsemée de petites veines ou filets de mine de plomb ; elle se trouve même fréquemment mêlée dans les mines de ce métal, comme dans celles de fer de dernière formation ; et, lorsqu’elle y est très abondante, comme dans la mine de Rammelsberg près de Goslar, on en tire le zinc en même temps que le plomb, en faisant placer dans le fourneau de fusion un vaisseau presque clos, à l’endroit où l’ardeur du feu n’est pas assez forte pour enflammer le zinc, et on le reçoit en substance coulante ; mais, quelque précaution que l’on prenne en le travaillant, même dans des vaisseaux bien clos, le zinc n’acquiert jamais une pureté entière, ni même telle qu’il doit l’avoir pour faire d’aussi bon laiton qu’on en fait avec la pierre calaminaire, dont la vapeur fournit les parties les plus pures du zinc ; et le laiton fait avec cette pierre est ductile, au lieu que celui qu’on fait avec le zinc est toujours aigre et cassant.

Il en est de même de la blende ; elle donne comme la calamine, par la cémentation, du plus beau et du meilleur laiton qu’on ne peut en obtenir par le mélange immédiat du zinc avec le cuivre : toutes deux même n’ont guère d’autre usage, et ne sont recherchées et travaillées que pour faire du cuivre jaune ; mais, comme je l’ai déjà dit, ce ne sont pas les deux seules matières qui contiennent du zinc ; car il est très généralement répandu, et en assez grande quantité, dans plusieurs mines de fer ; on le trouve aussi quelquefois sous la forme d’un sel ou vitriol blanc, et dans la blende il est toujours combiné avec le fer et le soufre.

Il se forme assez souvent dans les grands fourneaux des concrétions qui ont paru à nos chimistes[1] toutes semblables aux blendes naturelles. Cependant il y a toute raison de croire que les moyens de leur formation sont bien différents : ces blendes artificielles, produites par l’action du feu de nos fourneaux, doivent différer de celles qui se trouvent

  1. « Il y a des blendes artificielles qui imitent parfaitement les blendes naturelles dans leur tissu, leur couleur et leur phosphorescence… J’en ai vu un morceau d’un noir luisant et feuilleté provenant des fonderies de Saint-Bel… Un autre morceau, venant du même lieu, donnait, outre l’odeur du foie de soufre, des étincelles lorsqu’on le grattait avec un couteau, et n’en donnait point avec la plume… et un troisième morceau venant des fonderies de Saxe, et qui est de couleur jaunâtre, était si phosphorique qu’en le frottant de la plume on en tirait des étincelles comme de la blende rouge de Schaffenberg. » Lettre du docteur Demeste, t. II, p. 179 et 180. — Je dois observer qu’on trouvait en effet de ces blendes artificielles dans les laitiers des fonderies, mais que jusqu’ici l’on ne savait pas les produire à volonté, et que même on ne pouvait expliquer comment elles s’étaient formées ; on pensait au contraire que l’art ne pouvait imiter la nature dans la combinaison du zinc avec le soufre. M. de Morveau est le premier qui ait donné, cette année 1780, un procédé pour faire à volonté l’union directe du zinc et du soufre : il suffit pour cela de priver ce demi-métal de sa volatilité en le calcinant, et de le fondre ensuite avec le soufre ; il en résulte une vraie pyrite de zinc qui a, comme toutes les autres pyrites, une sorte de brillant métallique.