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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/519

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En Asie, les provinces de Pégu, de Camboye, de Calicut, de Cananor sont abondantes en grenats ; il s’en trouve aussi à Golconde et au Thibet[1].

Les anciens ont parlé des grenats d’Éthiopie, et l’on connaît aujourd’hui ceux de Madagascar ; il doit s’en trouver dans plusieurs autres contrées de l’Afrique : au reste, ces grenats apportés de Madagascar sont de la même nature que ceux de Bohême.

Enfin, quoique les voyageurs ne fassent pas mention des grenats d’Amérique, on ne peut guère douter qu’il n’y en ait dans plusieurs régions de ce vaste continent, comme il s’en trouve dans toutes les autres parties du monde.


HYACINTHE

Après le grenat se présente l’hyacinthe, qui approche de sa nature et qu’on doit aussi regarder comme un produit du schorl mêlé de substances métalliques. L’hyacinthe se trouve dans les mêmes lieux que le grenat ; elle donne de même une double réfraction : ces deux pierres cristallisées se rencontrent souvent ensemble dans les mêmes masses de rochers[2] ; on doit donc la rapporter aux cristaux vitreux, et c’est, après le grenat, la pierre vitreuse la plus dense[3]. Sa couleur n’est pas franche, elle est d’un rouge plus ou moins mêlé de jaune ; celles dont cette couleur orangée approche le plus du rouge sont les plus rares et les plus estimées : toutes perdent leur couleur au feu et y deviennent blanches, sans néanmoins perdre leur transparence, et elles exigent pour se fondre un plus grand degré de feu que le grenat[4]. On voit des hyacinthes en très grande quantité

  1. Le royaume de Golconde produit beaucoup de grenats. Histoire générale des voyages, t. IX, p. 517. — Vers les montagnes du Thibet, qui sont l’ancien Caucase, dans les terres d’un raja, au delà du royaume de Cachemire, on connaît trois montagnes dont l’une produit des grenats. Idem, t. X, p. 327.
  2. Cette pierre hyacinthe, aussi commune que le grenat (que souvent elle accompagne), peut sans doute, ainsi que celui-ci, se rencontrer dans les deux Indes aussi fréquemment qu’en Europe… Il y a des grenats qui ont la couleur de l’hyacinthe, et il y a des hyacinthes qui ont celle du grenat, mais ces deux pierres diffèrent beaucoup l’une de l’autre par la forme et la gravité spécifique… La dureté de l’hyacinthe l’emporte sur celle du grenat, mais trop peu ; la gravité spécifique de grenat est supérieure à celle de l’hyacinthe… L’hyacinthe est infusible au degré de feu qui met le grenat en fusion. Essai de cristallographie, par M. Romé de Lisle, t. II, p. 283 et suiv.
  3. La pesanteur spécifique de l’hyacinthe, est de 36 873, et celle du grenat syrien de 40 000.
  4. Cette pierre est d’un rouge tirant sur le jaune, c’est-à-dire d’une couleur plus ou moins approchante de celle de l’orangé. Lorsqu’on expose l’hyacinthe à l’action d’un feu assez violent, elle perd sa couleur et conserve sa transparence, ce qui prouve que la substance qui la colore est volatile : si on laisse ces cristaux exposés trop longtemps à l’action du feu, ils s’y vitrifient sans intermède, au moins à leur surface : car ils adhèrent alors entre eux et aux parois du creuset. La pierre qui porte le nom de jargon n’est autre chose que l’hyacinthe blanchie au feu pour imiter le diamant. Lettres du docteur Demeste, etc., t. Ier, p. 412. — La couleur de cette pierre est d’un rouge tirant sur le jaune, ce qui la rend plus ou moins transparente ; elle entre totalement en fusion au feu, elle est plus légère et plus tendre que le grenat, aussi la lime a-t-elle facilement de la prise sur elle.

    On a : 1o L’hyacinthe d’un jaune rougeâtre, ou l’hyacinthe orientale : on la trouve en Arabie, à Cananor, à Calicut et à Camboye ; la couleur de cette belle hyacinthe est d’un rouge faible d’écarlate ou de cornaline, ou de vermillon, tirant sur le rubis ou plutôt sur le grenat, au travers de laquelle on remarque ordinairement une légère nuance de violet colombin ou d’améthyste, elle est très resplendissante, dure, et reçoit un poli vif ;