Aller au contenu

Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/621

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un état imparfait de pétrification commencée : souvent même la forme de ces ossements ne conserve pas ses vraies dimensions, ils sont gonflés par l’interposition de la substance étrangère qui s’est insinuée dans leur texture, sans que l’ancienne substance fût détruite, c’est plutôt une incrustation intérieure qu’une véritable pétrification ; l’on peut voir et reconnaître aisément ce gonflement de volume dans les fémurs et autres os fossiles d’éléphant, qui sont au Cabinet du Roi ; leur dimension en longueur n’est pas proportionnelle à celles de la largeur et de l’épaisseur.

Je le répète, c’est à regret que je quitte ces objets intéressants, ces précieux monuments de la vieille nature, que ma propre vieillesse ne me laisse pas le temps d’examiner assez pour en tirer les conséquences que j’entrevois, mais qui, n’étant fondées que sur des aperçus, ne doivent pas trouver place dans cet ouvrage, où je me suis fait une loi de ne présenter que des vérités appuyées sur des faits. D’autres viendront après moi, qui pourront supputer le temps nécessaire au plus grand abaissement des mers et à la diminution des eaux par la multiplication des coquillages, des madrépores et de tous les corps pierreux qu’elles ne cessent de produire : ils balanceront les pertes et les gains de ce globe dont la chaleur propre s’exhale incessamment, mais qui reçoit en compensation tout le feu qui réside dans les détriments des corps organisés ; ils en concluront que, si la chaleur du globe était toujours la même et les générations d’animaux et de végétaux toujours aussi nombreuses, aussi promptes, la quantité de l’élément du feu augmenterait sans cesse, et qu’enfin, au lieu de finir par le froid et la glace, le globe pourrait périr par le feu. Ils compareront le temps qu’il a fallu pour que les détriments combustibles des animaux et végétaux aient été accumulés dans les premiers âges, au point d’entretenir pendant des siècles le feu des volcans ; ils compareront, dis-je, ce temps avec celui qui serait nécessaire pour qu’à force de multiplications des corps organisés, les premières couches de terre fussent entièrement composées de substances combustibles, ce qui, dès lors, pourrait produire un nouvel incendie général, ou du moins un très grand nombre de nouveaux volcans ; mais ils verront en même temps que la chaleur du globe diminuant sans cesse, cette fin n’est point à craindre, et que la diminution des eaux, jointe à la multiplication des corps organisés, ne pourra que retarder, de quelques milliers d’années, l’envahissement du globe entier par les glaces, et la mort de la nature par le froid.


PIERRES VITREUSES
MÉLANGÉES DE MATIÈRES CALCAIRES

Après les stalactites et concrétions purement calcaires, nous devons présenter celles qui sont mélangées de matières vitreuses et de substances calcaires, et nous observons d’abord que la plupart des matières vitreuses de seconde formation ne sont pas absolument pures : les unes, et c’est le plus grand nombre, doivent leur couleur à des vapeurs métalliques ; dans plusieurs autres le métal, et le fer en particulier, est entré comme partie massive et constituante, et leur a donné non seulement la couleur, mais une densité plus grande que celle d’aucun verre primitif, et qu’on ne peut attribuer qu’au métal ; enfin d’autres sont mélangées de parties calcaires en plus ou moins grande quantité. La zéolite, le lapis-lazuli, les pierres à fusil, la pierre meulière, et même les spaths fluors, sont tous mélangés en plus ou moins grande quantité de substances calcaires, et de matière vitreuse souvent chargée de parties métalliques, et chacune de ces pierres a des propriétés particulières, par lesquelles on doit les distinguer les unes des autres.