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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/105

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Ce sont aussi ces foudres électriques souterraines qui causent la plupart des tremblements de terre. Je dis la plupart, car la chute et l’affaissement subit des cavernes intérieures du globe produisent aussi des mouvements qui ne se font sentir qu’a de petites distances : ce sont plutôt des trépidations que de vrais tremblements, dont les plus fréquents et les plus violents doivent se rapporter aux commotions produites par les foudres électriques, puisque ces tremblements se font souvent sentir, presque au même moment, à plus de cent lieues de distance et dans tout l’espace intermédiaire. C’est le coup électrique qui se propage subitement et aussi loin que s’étendent les corps qui peuvent lui servir de conducteurs. Les secousses occasionnées par ces tonnerres souterrains sont quelquefois assez violentes pour bouleverser les terres en les élevant ou les abaissant, et changer en même temps la position des sources et la direction des cours d’eau.

Lorsque cette force de l’électricité agit à la surface du globe, elle ne se manifeste pas uniquement par des foudres, par des commotions et par les autres effets que nous venons d’exposer. Elle paraît changer de nature et produit de nouveaux phénomènes. En effet, elle se modifie pour donner naissance à une nouvelle force à laquelle on a donné le nom de magnétisme ; mais le magnétisme, bien moins général que l’électricité, n’agit que sur les matières ferrugineuses et ne se montre que par les effets de l’aimant et du fer, lesquels seuls peuvent fléchir et attirer une portion du courant universel et électrique, qui se porte directement et en sens contraire de l’équateur aux deux pôles.

Telle est donc l’origine des diverses forces, tant générales que particulières, dont nous venons de parler. L’attraction, en agissant en sens contraire de sa direction, a produit l’électricité ; et nous allons voir que le magnétisme n’est qu’une modification particulière de cette électricité générale, qui se fléchit dans son cours vers les matières ferrugineuses.

Nous ne connaissons toutes ces forces que par leurs effets ; les uns sont constants et généraux, les autres paraissent être variables et particuliers. La force d’attraction est universellement répandue, elle réside dans tout atome de matière et s’étend dans le système entier de l’univers, tandis que celle qui produit l’électricité agit à l’intérieur et s’étend à la surface du globe terrestre, mais n’affecte pas tous les corps de la même manière. Néanmoins, cette force électrique est encore plus générale que la force magnétique, qui n’appartient à aucune autre substance qu’à l’aimant et au fer.

Ces deux forces particulières ont des propriétés communes avec celles de l’attraction universelle. Toutes trois agissent à plus ou moins de distance, et les effets du magnétisme et de l’électricité sont toujours combinés avec l’effet général de l’attraction qui appartient à toute matière, et qui, par conséquent, influe nécessairement sur l’action de ces deux forces, dont les effets comparés entre eux peuvent être semblables ou différents, variables ou constants, fugitifs ou permanents, et souvent paraître opposés ou contraires à l’action de la force universelle. Car, quoique cette force d’attraction s’exerce sans cesse en tout et partout, elle est vaincue par celle de l’électricité et du magnétisme, toutes les fois que ces forces agissent avec assez d’énergie pour surmonter l’effet de l’attraction qui n’est jamais que proportionnel à la masse des corps.

Les effets de l’électricité et du magnétisme sont produits par des forces impulsives particulières, qu’on ne doit point assimiler à l’impulsion ou répulsion primitive : celle-ci s’exerce dans l’espace vide et n’a d’autre cause que l’attraction qui force toute matière à se rapprocher pour se réunir. L’électricité et le magnétisme supposent, au contraire, des impulsions particulières, causées par un fluide actif qui environne les corps électriques et magnétiques et qui doit les affecter différemment, suivant leur différente nature.

Mais quel est ou peut être l’agent ou le moyen employé par la nature pour déterminer et fléchir l’électricité du globe en magnétisme vers le fer, de préférence à toute autre masse minérale ou métallique ? Si les conjectures, ou même de simples vues, sont permises sur un objet qui, par sa profondeur et son ancienneté contemporaine des premières