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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/128

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Les voyageurs nous assurent qu’en Asie il y a de bons aimants au Bengale, à Siam[1], à la Chine[2] et aux îles Philippines[3] ; ils font aussi mention de ceux de l’Afrique[4] et de l’Amérique[5].


ARTICLE III

DE L’ATTRACTION ET DE LA RÉPULSION DE L’AIMANT.

Le mouvement du magnétisme semble être composé de deux forces, l’une attractive et l’autre directive. Un aimant, de quelque figure qu’il soit, attire le fer de tous côtés et dans tous les points de sa surface ; et plus les pierres d’aimant sont grosses, moins elles ont de force attractive, relativement à leur volume ; elles en ont d’autant plus, qu’elles sont plus pesantes, et toutes ont beaucoup moins de puissance d’attraction quand elles sont nues que quand elles sont armées de fer ou d’acier. La force directive, au contraire, se marque mieux et avec plus d’énergie sur les aimants nus que sur ceux qui sont armés.

Quelques savants physiciens, et entre autres Taylor et Musschenbroëck, ont essayé de déterminer par des expériences l’étendue de la sphère d’attraction de l’aimant, et l’intensité de cette action à différentes distances ; ils ont observé qu’avec de bons aimants cette force attractive était sensible jusqu’à treize ou quatorze pieds de distance, et, sans doute, elle s’étend encore plus loin ; ils ont aussi reconnu que rien ne pouvait intercepter l’action de cette force, en sorte qu’un aimant renfermé dans une boîte agit toujours à la même distance. Ces faits suffisent pour qu’on puisse concevoir qu’en plaçant et cachant des aimants

  1. Il y a deux mines d’aimant dans le royaume de Siam… Ces mines sont dans une montagne à laquelle elles paraissent comme attachées ; elles semblent être divisées en deux roches, qui apparemment sont réunies sous terre ; la grande, qui s’étend d’orient en occident, peut avoir vingt-quatre ou vingt-cinq pas géométriques de longueur et quatre ou cinq de largeur. Dans sa plus grande hauteur, elle a neuf ou dix pieds. La petite, qui est au nord de la grande, dont elle n’est éloignée que de sept ou huit pieds, a trois toises de long, peu de hauteur et de largeur ; elle est d’un aimant bien plus vif que l’autre. Elle attirait avec une force extraordinaire les instruments de fer dont on se servait ; on ne pouvait en détacher aucun morceau, parce que les instruments de fer qui étaient fort mal trempés étaient aussitôt reboulés. On s’attacha à la grande, dont on eut peine de rompre quelques morceaux qui avaient de la saillie, et qui donnaient de la prise au marteau. On ne laissa pas que d’en tirer quelques bonnes pierres ; les pôles de la mine, autant qu’on peut en juger par les morceaux de fer qu’on y appliqua, regardaient le midi et le septentrion ; car on n’a pu rien reconnaître par la boussole, l’aiguille s’affolant sitôt qu’on l’en approchait. Histoire générale des Voyages, t. IX, p. 206 et 245.
  2. Il y a peu de provinces dans la Chine où l’on ne trouve des pierres d’aimant. On en apporte aussi du Japon à la Chine, mais on les emploie particulièrement aux usages de la médecine ; elles se vendent au poids, et les plus chères ne se vendent jamais plus de huit sous l’once. Idem, t. VI, p. 85.
  3. On trouve beaucoup d’aimant à Mindanao… Voyage de M. Le Gentil aux Indes ; Paris, 1781, t. II, p. 36.
  4. On trouve dans le Bambouk, en Afrique, d’excellentes pierres d’aimant, dont on a envoyé plusieurs morceaux en France. Histoire générale des Voyages, t. II, p. 644.
  5. On fit voir à Gemelli-Careri, dans un cabinet de raretés, au Mexique, une pierre d’aimant, de la grosseur d’une pomme ordinaire, qui enlevait dix livres de fer. (Idem, t. XI, Idem, p. 536.) — Le corrégiment de Copiapo, au Chili, produit quantité de pierres d’aimant, t. XIII, p. 144.