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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 1.djvu/146

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quatre parties de la barre sont d’autant plus faibles, qu’ils s’éloignent davantage de l’aimant, et leur nombre, toutes choses égales, est proportionnel à la longueur de la barre[1].

Si l’on applique le pôle de l’aimant sur le milieu d’une lame, elle acquiert dans ce point un pôle contraire, et, dans les deux extrémités, deux pôles semblables à celui qui la touche : si le fer est épais, la surface opposée à l’aimant acquiert aussi un pôle semblable à celui qui est appliqué contre le fer ; et si la barre est un peu longue, les deux extrémités présentent la suite des pôles alternativement contraires dont nous venons de parler[2].

La facilité avec laquelle le fer reçoit la vertu magnétique par le contact ou le voisinage d’un aimant, l’attraction mutuelle des pôles opposés et la répulsion des pôles semblables, sont confirmées par les phénomènes suivants.

Lorsque l’on donne à un morceau de fer la forme d’une fourche et qu’on applique une des branches à un aimant, le fer devient magnétique et son extrémité inférieure peut soutenir une petite masse de fer ; mais, si l’on approche de la seconde branche de la fourche un aimant dont le pôle soit opposé à celui du premier aimant, le morceau de fer soumis à deux forces qui tendent à se détruire recevant deux vertus contraires, ou, pour mieux dire, n’en recevant plus aucune, perd son magnétisme et laisse échapper le poids qu’il soutenait.

Si l’on suspend un petit fil de fer mou, long de quelques pouces, et qu’on approche un aimant de son extrémité inférieure en présentant aussi à cette extrémité un morceau de fer, ce morceau acquerra une vertu opposée à celle du pôle voisin de l’aimant ; il repoussera l’extrémité inférieure du fil de fer qui aura obtenu une force semblable à celle qu’il possédera, et attirera l’extrémité supérieure qui jouira d’une vertu contraire.

Lorsqu’on suspend un poids à une lame d’acier mince, aimantée et horizontale, et que l’on place au-dessus de cette lame une seconde lame aimantée, de même force, d’égale grandeur, couchée sur la première, la recouvrant en entier et présentant un pôle opposé au pôle qui soutient le poids, ce poids n’est plus retenu. Si la lame supérieure jouit d’une plus grande force que l’inférieure, le poids tombera avant qu’elle ne touche la seconde lame ; mais, en continuant de l’approcher, elle agira par son excès de force sur les nouveaux poids qu’on lui présentera, et les soutiendra, malgré l’action contraire de la lame inférieure.

Lorsque l’on suspend un poids à un aimant et que l’on approche un second aimant au-dessus de ce poids, la force du premier aimant est augmentée dans le cas où les pôles contraires sont opposés, et se trouve diminuée quand les pôles semblables sont les plus voisins : les mêmes effets arriveront et le poids sera également soumis à deux forces agissant dans la même direction, si l’on remplace le second aimant par un morceau de fer auquel la proximité du premier aimant communiquera une vertu magnétique opposée à celle du pôle le plus voisin[3]. Ceci avait été observé précédemment par M. de Réaumur, qui a reconnu qu’un aimant enlevait une masse de fer placée sur une enclume de fer avec plus de facilité que lorsqu’elle était placée sur une autre matière.

Les faits que nous venons de rapporter nous démontrent[4] pourquoi un aimant acquiert une nouvelle vertu en soutenant du fer qu’il aimante par son voisinage, et pourquoi, si on lui enlève des poids qu’on était parvenu à lui faire porter en le chargeant graduellement, il refuse de les soutenir lorsqu’on les lui rend tous à la fois.

  1. Æpinus, no 203.
  2. Idem, nos 211 et 212.
  3. Idem, nos 156 et suiv.
  4. Idem, no 208.