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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/108

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trait, dis-je, que ce genre du grand vautour est composé de plus d’une espèce que l’on peut également y rapporter ; car il n’y a que le percnoptère dont il ait indiqué l’espèce en particulier ; et comme il ne décrit aucun des autres grands vautours, on pourrait douter avec raison que le griffon fût le même que son grand vautour ; le vautour commun, qui est tout aussi grand et peut-être moins rare que le griffon, pourrait être également pris pour ce grand vautour : en sorte qu’on doit penser que MM. de l’Académie des Sciences ont eu tort d’affirmer comme certaine une chose aussi équivoque et aussi douteuse, sans avoir même indiqué la raison ou le fondement de leur assertion, qui ne peut se trouver vraie que par hasard, et, ne peut être prouvée que par des réflexions et des comparaisons qu’ils n’avaient pas faites : j’ai tâché d’y suppléer, et voici les raisons qui m’ont déterminé à croire que notre griffon est en effet le grand vautour des anciens.

Il me paraît que l’espèce du griffon est composée de deux variétés : la première, qui a été appelée vautour fauve, et la seconde vautour doré par les naturalistes[1]. Les différences entre ces deux oiseaux, dont le premier est le griffon, ne sont pas assez grandes pour en faire deux espèces distinctes et séparées, car tous deux sont de la même grandeur, et en général à peu près de la même couleur ; tous deux ont la queue courte, relativement aux ailes, qui sont très longues[2] ; et, par ce caractère qui leur est commun, ils diffèrent des autres vautours : ces ressemblances ont même frappé d’autres naturalistes avant moi[3], au point qu’ils l’ont appelé le vautour fauve, congener du vautour doré : je suis même très porté à croire que l’oiseau indiqué par Belon sous le nom de vautour noir est encore de la même espèce que le griffon et le vautour doré ; car ce vautour est de la même grandeur, et a le dos et les ailes de la même couleur que le vautour doré. Or, en réunissant en une seule espèce ces trois variétés, le griffon sera le moins rare des grands vautours, et celui par conséquent qu’Aristote aura principalement indiqué : et ce qui rend cette présomption encore plus vraisemblable, c’est que, selon Belon, ce grand vautour noir se trouve fréquemment en Égypte, en Arabie et dans les îles de l’Archipel, et que dès lors il doit être assez commun en Grèce. Quoi qu’il en soit, il me semble qu’on peut réduire les grands vautours qui se trouvent en Europe à quatre

  1. « Vultur aureus Alberti Magni, Gessneri, Raii, Willughbei. » Klein, Ord. avium, p. 43, no 1. — « Vultur bæticus, sive castaneus. » Aldrov., Avi., t. I, p. 273. — Le vautour doré. Brisson, Ornithol., t. I, p. 458.
  2. M. Brisson donne à son vautour doré une queue de deux pieds trois pouces de longueur, et trois pieds à la plus grande plume de l’aile, ce qui me ferait douter que ce soit le même oiseau que le vautour doré des autres auteurs, qui a la queue courte en comparaison des ailes.
  3. « Vultur fulvus bætico congener. » Ray, Synops. avi., p. 10, no 4 ; et Willughby, Ornithol., p. 36.