Aller au contenu

Page:Buffon - Oeuvres completes, 1829, T02.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
121
ART. X. FLEUVES.

deur, de l’eau de la mer, laquelle ne s’est pas trouvée plus salée que celle de la surface : il y a même des endroits où l’eau de la surface étant salée, l’eau du fond se trouve douce ; et cela doit arriver dans tous les lieux où il y a des fontaines et des sources qui sourdent du fond de la mer, comme auprès de Goa, à Ormus, et même dans la mer de Naples, où il y des sources chaudes dans le fond[1].

  1. Au sujet de la salure de la mer, il y a deux opinions, qui toutes deux sont fondées et en partie vraies. Halley attribue la salure de la mer uniquement aux sels de la terre que les fleuves y transportent, et pense même qu’on peut reconnoître l’ancienneté du monde par le degré de cette salure des eaux de la mer. Leibnitz croit au contraire que le globe de la terre ayant été liquéfié par le feu, les sels et les autres parties empyreumatiques ont produit avec les vapeurs aqueuses une eau lixivielle et salée, et que par conséquent la mer avoit son degré de salure dès le commencement. Les opinions de ces deux grands physiciens, quoique opposées, doivent être réunies, et peuvent même s’accorder avec la mienne : il est en effet très probable que l’action du feu combinée avec celle de l’eau a fait la dissolution de toutes les matières salines qui se sont trouvées à la surface de la terre dès le commencement, et que par conséquent le premier degré de salure de la mer provient de la cause indiquée par Leibnitz ; mais cela n’empêche pas que la seconde cause désignée par Halley n’ait aussi très considérablement influé sur le degré de la salure actuelle de la mer, qui ne peut manquer d’aller toujours en augmentant, parce qu’en effet les fleuves ne cessent de transporter à la mer une grande quantité de sels fixes, que l’évaporation ne peut enlever ; ils restent donc mêlés avec la masse des eaux, qui, dans la mer, se trouvent généralement d’autant plus salées qu’elles sont plus éloignées de l’embouchure des fleuves, et que la chaleur du climat y produit une plus grande évaporation. La preuve que cette seconde cause y fait peut-être autant et plus que la première, c’est que tous les lacs dont il sort des fleuves, ne sont point salés ; tandis que presque tous ceux qui reçoivent des fleuves sans qu’ils en sortent, sont imprégnés de sel. La mer Caspienne, le lac Aral, la mer Morte, etc., ne doivent leur salure qu’aux sels que les fleuves y transportent, et que l’évaporation ne peut enlever. (Add. Buff.)