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Page:Buffon - Oeuvres completes, 1829, T02.djvu/288

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THÉORIE DE LA TERRE.

frayeur, et nos matelots, au lieu de s’enhardir, fomentoient leur peur par les contes qu’ils débitoient. Si ces trombes, disoient-ils, viennent à tomber sur notre vaisseau, elle l’enlèveront, et, le laissant ensuite retomber, elles le submergeront. D’autres (et ceux-ci étoient les officiers) répondoient d’un ton décisif qu’elles n’enlèveroient pas le vaisseau, mais que venant à le rencontrer sur leur route, cet obstacle romproit la communication qu’elles avoient avec l’eau de la mer, et qu’étant pleines d’eau, toute l’eau qu’elles renfermeroient tomberoit perpendiculairement sur le tillac du vaisseau et le briseroit.

» Pour prévenir ce malheur, on amena les voiles et on chargea le canon, les gens de mer prétendant que le bruit du canon, agitant l’air, fait crever les trombes et les dissipe : mais nous n’eûmes pas besoin de recourir à ce remède ; quand elles eurent couru pendant dix minutes autour du vaisseau, les unes à un quart de lieue, les autres à une moindre distance, nous vîmes que les canaux s’étrécissoient peu à peu, qu’ils se détachèrent de la superficie de la mer, et qu’enfin ils se dissipèrent[1]. »

Il paroît par la description que ces deux voyageurs donnent des trombes, qu’elles sont produites, au moins en partie, par l’action d’un feu ou d’une fumée qui s’élève du fond de la mer avec une grande violence, et qu’elles sont fort différentes de l’autre espèce de trombe qui est produite par l’action des vents contraires, et par la compression forcée et la résolution subite d’un ou de plusieurs nuages, comme le

  1. Tome I, page 191.