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Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/132

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CHRONIQUES


avec cette différence que, chez nous, les frontiéristes s’appellent des Fenians.

Dans l’intervalle des cinq jours que Don Carlos a passés sur la terre de ses aïeux, un écrivain du Figaro a eu un accès d’enthousiasme légitimiste comme il est rare d’en avoir de nos jours :

« Vous, prétendant, dit-il, vous mourrez en roi, ce qui est une manière de l’être ! Votre mort, glorieuse pour vous, servira à la cause de ces monarchies qu’on croit perdues et qui peut-être le sont… Elles ont assez péché pour cela ! Votre mort frappera sur les cœurs qui les aiment et qui voudraient les relever. Dans la tombe vous emporterez tout entier le drapeau sous lequel peuple et rois ont combattu et fait la gloire de leur pays… Malheureusement, l’horizon est si noir et le temps si plein de désespérance, que le mieux pour vous et pour le monde qui vous regarde et qui a désappris d’admirer, est peut-être de mourir dans cette lutte suprême que vous n’avez pas redoutée.

« Les races qui finissent ont des devoirs envers la gloire des aïeux. Race de héros, il faut mourir en héros. Vous l’avez compris, Sire. »

Don Carlos n’a pas compris tout à fait ; il y a tant de choses qu’on ne voit pas clairement lorsqu’il s’agit de mourir ! Et, du reste, la perspective d’être le dernier roi absolu de l’Espagne ne touche pas tous les cœurs de héros, quelque droit qu’ils puissent avoir.