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Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/164

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CHRONIQUES

Chauveau a cru devoir répondre, après Sir George, à la santé offerte aux ministres fédéraux. L’hon. Premier de Québec l’a reconnu lui-même : « Le gouvernement provincial, a-t-il dit, remplit sa tâche avec autant de bonne volonté que possible vis-à-vis le gouvernement fédéral. L’un et l’autre ont surtout combiné leurs efforts pour la colonisation. »

En effet, il est impossible de mieux combiner les efforts et d’arriver à moins de résultats. Les deux gouvernements combinés ont fait des efforts superbes qui ont abouti au néant. Il est vrai que l’abbé Verbist, parti l’automne dernier, avec une mission spéciale pour amener ici des immigrants belges, est revenu avec sa nièce et un comte quelconque qui veut faire de la colle forte, mais, jusqu’à présent, cet immense effort combiné n’a pas eu d’effets sensibles et la colonisation ne s’en est pas accrue. Ce n’est assurément la faute de personne, si ce n’est celle des immigrants eux-mêmes qui ne voient pas ce qu’ils viendraient faire dans un pays où leurs compatriotes, venus l’année dernière, ont failli crever de froid et de faim. Mais qu’importe ! le point essentiel pour le moment est de constater avec quelle merveilleuse harmonie les deux gouvernements s’entendent pour ne rien produire.

Cependant Dieu sait si nous aurions besoin d’émigrants et surtout d’émigrantes pour faire la soupe. Les cuisinières deviennent des êtres fabuleux ; elles abandonnent la popotte pour se mettre dans les manufactures. Dernièrement, des servantes, arrivées d’Angleterre, demandaient vingt dollars par mois et, comme on les leur refusait, elles sont parties pour les États-Unis. Il ne faut pas les en blâmer ; elles sont logiques.