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Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/167

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CHRONIQUES

condamner de si vaillants hommes à la mort subite loin de l’ennemi ? Pourquoi, sous prétexte que les artilleurs sont de bonnes têtes, leur mettre dessus une tinette de cinq gallons par une chaleur de 95 degrés à l’ombre ? Dans l’esprit du ministre de la guerre, le bonnet à poil ne pouvait avoir d’autre objet que d’épouvanter le peuple et d’inspirer une loyauté d’ours. En conséquence, il a recherché une coiffure d’un aspect monumental et imposant sans doute. Il a réussi sous ce rapport ; mais je me demande pourquoi, dans un pays où les arts sont encore à naître, on va ainsi, sans raison sérieuse, confondre la coiffure avec l’architecture, élever sur de simples mortels des monuments qui les écrasent par leur grandeur ? Le patriotisme peut se passer de cette exposition de fourrures au temps de la canicule et je crois faire acte de bon citoyen en demandant que des ventouses soient pratiquées au sommet de ces bonnets à poil pour l’aération intérieure, ou que, du moins, les artilleurs aient un parapluie fixé à leurs baïonnettes.


QUATRIÈME CAUSERIE


« Donnez-moi un levier et je soulèverai le monde, » disait Archimède.

Dans ce temps-là, le monde n’était pas aussi grand qu’aujourd’hui ; on ne connaissait guère que l’Europe, une partie de l’Asie et le littoral nord de l’Afrique. On n’avait pas encore découvert le Manitoba ni la Colombie Anglaise ; on ignorait aussi complètement le