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CHRONIQUES

un arpent ou deux de largeur, mais des détours sans fin qui la font perdre à chaque instant de vue ; tantôt des terrains plats, tantôt des escarpements subits, tantôt des oasis délicieusement couchées dans les eaux.

Il m’a fallu trois heures pour me rendre des Éboulements à la Baie Saint-Paul, distance de trois lieues. J’avais pris un cabriolet, véhicule disloquant ; aussi, à mon arrivée, j’avais les os comme un effet d’indigestion, et le cœur me battait dans la poitrine comme un caillou qu’on met au bout d’une planche pour le faire sauter.

La Baie Saint-Paul fait un contraste étonnant avec le reste de la côte nord ; la vallée, coupée en deux par la rivière, a environ deux milles de largeur, et, sur toute sa longueur, passe un chemin agréable et facile, de quatre lieues, qui mène à Saint-Urbain, où se trouve la mine de fer titanique.

Saint-Urbain est une concession située en arrière de la Baie Saint-Paul, et qui compte à peu près cent soixante voteurs, tous des rouges incorrigibles ; c’est désolant.

Rien n’indique la présence d’une mine ; il faut faire quinze arpents en dehors du chemin pour se rendre au foyer d’opération. Là, on trouve six bâtisses en voie de construction, deux pour mettre le charbon, une pour le minerai et trois pour loger les travailleurs. Ces six bâtisses sont en bois ; à vingt pas plus loin, une cinquantaine d’ouvriers déblaient et creusent le terrain pour poser les fondations des bâtiments qui contiendront les fourneaux. Pour arriver à la mine