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Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/288

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avoir rendu d’avance le juste tribut d’éloges qu’il mérite.

De Dalhousie à Bathurst, ce n’est ni très gai ni très beau. Il y a là dix-huit lieues monotones, coupées de nombreuses savanes et de cours d’eau plus nombreux encore ; pas de villages, mais une suite de maisons plus ou moins espacées ; quatre à cinq chapelles protestantes et deux ou trois églises catholiques, dont la plus grande est celle de Madisco, l’endroit le plus peuplé, le plus riche de tout le littoral. Ces églises sont toutes sur le même modèle et les maisons d’école, qui sont bâties de distance en distance, leur ressemblent à s’y tromper.

On dirait que tout a été calculé d’avance dans ce pays pour reproduire de toutes choses une même image. C’est une stéréotypie énervante ; pas de paysage, pas d’accidents de terrain, pas de variété, si ce n’est que la Baie a parfois quinze milles, d’autres fois vingt milles, d’autres fois trente milles de largeur. À l’un des endroits où elle a vingt milles, j’ai appris qu’un pont de glace s’était formé, il y a quelques années, et que tous les maquignons du lieu avaient concouru pour le prix donné à celui qui traverserait le pont dans le moins de temps. C’était un fait merveilleux que ce pont de glace sur une largeur de vingt milles, et les vieux habitants en parlent encore avec un attendrissement qui vous gagne.

Ces vieux habitants sont en général des Écossais et des Acadiens, pour la plupart cultivateurs et vivant assez à l’aise sur des terres ayant toutes la même fer-