Aller au contenu

Page:Buies - Chroniques, Tome 1, Humeurs et caprices, 1884.djvu/341

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LE NOUVEL AN



Est-ce une année de plus ou une année de moins que nous avons aujourd’hui ? Hélas ! c’est bien plutôt une année de moins. Alors, conçoit-on tout ce monde qui se félicite d’en être arrivé là ? Conçoit-on tous ces souhaits insensés, toutes ces salutations à la vieillesse qui s’avance, toutes ces cajoleries à cette cruelle nouvelle année qui vous apporte des chagrins en perspective et le sceau éternel, ineffaçable, mis sur le passé ?

Pour moi, j’avoue que je ne suis nullement gai ce jourd’hui, et je compte bien le dire à tous ceux que je vais voir. Ce ne sont pas des félicitations qu’ils entendront de ma bouche, mais une litanie d’agonisant. Je leur parlerai de ce qui n’est plus au lieu de leur parler de ce qui sera, on court moins risque ainsi de se tromper. Du reste, si le passé laisse des regrets, il n’en est pas moins le passé, et ce qu’on a souffert est une affaire faite.

Puisque le bonheur est impossible, je ne vois pas pourquoi l’on persiste à se le souhaiter régulièrement à un jour fixe sur tous les tons connus de la doucereuseté.

Mais ce que j’admire le plus, c’est ce bon saint Sylvestre qui ne se lasse pas, depuis le pape Grégoire XIII, qui l’a institué à cette fonction, de suivre le