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Page:Buies - La lanterne, 1884.djvu/121

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LA LANTERNE


No 10




Le culte de l’Anglais, c’est sa reine ; celui du Français, le beau ; celui de l’Espagnol, le pronunciamiento ; l’Italien adore la conspiration, le Yankee est amoureux fou du risque ; l’idole du Canadien, c’est le… Qu’en dira-t-on ?

Nul ne se soucie autant qu’il le fait de ce que pense, et surtout de ce que dit autrui.

Un tel veut bien me donner un conseil. « Vous allez trop loin, me dit-il, vous imprimez des choses qu’on ne saurait répéter, vous empêchez ainsi grand nombre de gens de vous lire ; il faut ménager les susceptibilités, les idées reçues, les opinions et même les préjugés qui ont leur raison d’être, qui s’expliquent par les circonstances, et qu’on ne peut modifier ou détruire sans changer complètement l’éducation, les conditions sociales, les habitudes… » ”

Ce refrain-là n’a pas de variantes. On rencontre un bonhomme dans la rue, un brave citoyen qui n’est jamais sorti de chez lui, qui ne sait pas que la terre tourne, qui n’a jamais rien lu et qui, tombant par hasard sur un numéro de la Lanterne, recule d’effroi. Ce bonhomme vous dit que mon pamphlet est épouvantable, vous demande comment il se fait qu’on l’imprime, qu’il est impossible de le laisser pénétrer dans les familles, et vous qui êtes un libéral, j’entends libéral comme les cinq-huitièmes de ceux qui prennent ce nom, vous vous dites, ou vous venez me dire que je dépasse toutes les bornes, que le sentiment