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Page:Buies - Récits de voyages, 1890.djvu/103

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sur les grands lacs

face, et voilà aussi pourquoi il est rare que le Supérieur ne soit pas couvert de brouillards plus ou moins épais durant ces deux mois, les plus chauds de l’année.


Pour nous il fit un temps digne d’être chanté dans un concours de poëtes et de figurer parmi les pronostics encore vierges de Vennor. Un léger brouillard nous enveloppait, comme un voile de gaz ou de tulle fine que nos regards perçaient aisément, du moins jusqu’à une quinzaine d’arpents tout autour de notre steamer. On eût dit un nombre infini de fils de la Vierge flottant et se balançant sous un battement d’ailes ; le soleil apparaissait au plus profond des cieux comme un gros disque rouge sanglant, mais privé de rayons, globe abandonné dans un espace muet, sans horizons et sans atmosphère. Pas d’autre brise que celle que faisait mesurément, par bouffées égales, de chaque côté de nous, la proue du steamer fendant l’abîme azuré ; toutes les deux ou trois minutes, le sifflet à vapeur faisait entendre un cri aigu, perçant, qui devait porter l’effroi dans les retraites inaccessibles où Éole s’était