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Page:Buies - Récits de voyages, 1890.djvu/159

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à travers les laurentides

Mme St. Onge se levait, elle avait les cheveux littéralement pris dans une masse de frimas, et il lui était impossible de les démêler avant que le feu du poêle eût attiédi le froid de ce misérable intérieur. Pour gagner sa pension, elle lavait les effets de tous les hôtes de la hutte, et souvent, m’a t’elle raconté, « j’ai cru que j’allais mourir sur place ; le docteur était convaincu que je ne verrais pas la fin de l’hiver ; comment j’ai pu résister, c’est pour moi un miracle ; je n’en suis pas morte, mais j’ai contracté des rhumatismes dont je ne guérirai jamais. » Telle est, vingt fois sur trente, la vie des défricheurs qui s’aventurent les premiers dans la forêt.

Pendant ce temps, St. Onge construisait seul, à deux milles plus loin, sur le bord même de la rivière à Pierre, le log-house qu’il habitait en 1887, mais depuis lors considérablement agrandi et amélioré. Quand il s’y rendit au printemps avec sa femme, ils n’avaient à eux deux pour toute fortune qu’un dollar, et personne, pas une âme auprès d’eux pour les aider, les secourir, leur prêter le moindre appui. Mais le chemin de fer se construisait toujours, malgré les prédictions des incrédules, et la foule des travailleurs était arrivée à la rivière à Pierre. C’est