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Page:Buies - Récits de voyages, 1890.djvu/167

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à travers les laurentides

peuples, aux Chevaliers du Travail, à la destruction de Sodôme, en ayant bien soin de ne pas regarder derrière moi, au creusement du bassin Louise, et je supputais combien il faudrait encore de siècles pour que ce travail fût complété… je pensais aux amusements délirants auxquels se livrent les factionnaires de nuit du Palais Législatif, aux comptes supplémentaires, vulgairement appelés extras, des entrepreneurs publics, lorsque mon attention fut soudainement éveillée par un bruit mystérieux, persistant, acharné, semblable à l’attaque furieuse et continue d’une souris sur une mince feuille de bois qui la séparerait d’un bon morceau de fromage. J’écoutai et je reconnus la saperde, ver à bois qui loge au cœur des plus gros arbres, les ronge jour et nuit, finit par les percer de part en part, et je me mis à faire des réflexions extrêmement profondes sur le travail invisible de ce petit être solitaire, accomplissant sans relâche son unique fonction, emprisonné toute sa vie dans un tronc épais et dur qui lui cède néanmoins, et cherchant à parvenir à la lumière, comme tout ce qui vit, comme tout ce qui respire ; je songeai à la toute-puissance de la persévérance, à la vertu magique contenue dans un travail à peine appréciable, à peine perceptible, mais dirigé incessamment vers le même