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Page:Bulwer-Lytton - Alice ou les mystères.pdf/151

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nent à un prudent hymen, dit Vargrave en souriant. Mais écoutez ! je n’entends plus le bruit du billard ; on pourrait nous trouver ici. Il vaut mieux nous séparer. »

Lord Vargrave entra dans la salle de billard. Les jeunes gens venaient d’achever leur partie, et se disposaient à rendre visite à Thunderer, qui avait gagné le prix aux courses, et qui maintenant appartenait à lord Doltimore.

Vargrave les accompagna à l’écurie ; et après avoir dissimulé, aussi bien que possible, son ignorance en matière de chevaux sous une profusion de compliments à propos du poitrail, du train de derrière, de la race, de la force, du bon état, et des qualités éminentes de Thunderer, il s’arrangea de manière à attirer Doltimore dans la cour, tandis que le colonel Legard restait en conférence sérieuse avec le groom.

« Doltimore, je quitte Knaresdean demain ; vous retournez à Londres sans doute ? Voulez-vous vous charger de remettre pour moi un petit paquet au ministère de l’Intérieur ?

— Certainement, aussitôt que j’irai à Londres ; mais je pense passer quelques jours chez l’oncle de Legard, le vieil amiral. Il a un pavillon de chasse dans ce voisinage, et il nous y a invités tous deux.

— Oh ! je devine l’attrait qui vous retient ! et c’est assurément un attrait charmant : la plus belle fille du comté. C’est dommage qu’elle n’ait pas de fortune.

— Je ne tiens pas à la fortune, dit Doltimore, en rougissant, et en se redressant dans sa cravate ; mais vous vous trompez ; je n’y songe pas. Miss Merton est une fort jolie personne ; mais je doute qu’elle se soucie beaucoup de moi. Je n’épouserais jamais une femme qui ne serait pas très amoureuse de moi. »

Et lord Doltimore fit entendre un petit rire niais.

« Vous êtes plus modeste que clairvoyant, dit lord Vargrave en souriant, mais retenez ceci : je vous prédis, moi, que la beauté qui fera sensation à la saison prochaine sera une certaine Caroline, lady Doltimore. »

La conversation en resta là.

« Je crois que voilà une affaire qui s’arrangera, se dit Vargrave, en s’habillant avant le dîner. Caroline disposera de Doltimore, et moi je disposerai d’un vote à la Chambre des Pairs et de trois à la Chambre des Communes. Je l’ai déjà amené à des opinions politiques convenables. Tout ceci n’est assurément qu’une bagatelle, mais je n’avais que cela