Aller au contenu

Page:Bulwer-Lytton - Alice ou les mystères.pdf/77

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était couverte de lierre et de pariétaires innombrables ; de longues herbes envahissaient l’avenue abandonnée.

« Ce domaine est fort mal tenu, dit Caroline, et l’était déjà du vivant du dernier propriétaire. Il a été légué à M. Maltravers par l’oncle de sa mère. Il vaut mieux que nous entrions dans la maison par la petite porte. L’entrée principale est toujours fermée. »

Caroline prit un sentier qui conduisait à un jardin d’agrément, séparé du parc par un fossé, en travers duquel se trouvait une planche. Elle ouvrit une petite porte qui se détachait de ses gonds rouillés, et elle se dirigea vers le vieux bâtiment. Il se trouvait là une grande porte vitrée qui conduisait, par un perron de trois marches, au jardin. D’un côté, s’élevait une étroite tourelle carrée surmontée d’un dôme doré et d’une vieille girouette pittoresque ; sous l’architrave de la tourelle se trouvait un cadran solaire, entouré d’un encadrement de pierre. Un autre cadran solaire s’élevait dans le jardin, portant cette belle et commune devise : « Non numero horas, nisi serenas. »

De l’autre côté de la fenêtre vitrée un énorme arc-boutant jetait son ombre massive. Il y avait quelque chose dans tout l’aspect de ce lieu qui invitait à la contemplation et au repos ; quelque chose de quasi monastique. La gaîté du joyeux printemps ne pouvait le dépouiller d’une certaine tristesse, qui n’avait pourtant rien de pénible, ni pour la jeunesse qui s’abandonne volontiers à un vague sentiment de mélancolie, ni pour ceux qui, ayant connu de véritables douleurs, cherchent un calmant dans la méditation et le souvenir. La porte basse, de couleur sombre, renfoncée dans les murailles épaisses de la tourelle, était fermée à double tour et la sonnette placée auprès de cette porte était cassée. Caroline s’en éloigna avec impatience.

« Il faut que nous allions de l’autre côté de la maison, et que nous tâchions de nous faire entendre du vieux bonhomme qui est sourd.

— Oh ! Caroline ! s’écria Cécile, la grande fenêtre est ouverte. Et elle franchit en courant les marches du perron.

— C’est heureux, » dit Caroline ; et elles suivirent toutes Cécile.

Éveline se trouvait maintenant dans la bibliothèque dont lui avait parlé mistress Merton. C’était une grande pièce longue d’environ cinquante pieds, et large en proportion. Elle était un peu sombre, car le jour n’y pénétrait que par