Aller au contenu

Page:Bulwer-Lytton - Alice ou les mystères.pdf/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Appelez-moi Ernest, dit Maltravers.

— Pourquoi ne commençons-nous pas ? s’écrièrent les enfants.

— Voyons, Éveline, soyez sage, mademoiselle, » dit Sophie, tandis qu’Éveline, honteuse, contrariée, et presque prête à pleurer, cherchait à repousser le bandeau.

M. Merton fit intervenir son autorité ; mais les enfants protestèrent par leurs clameurs, et Éveline céda promptement. La Fortune avait mission de tirer les billets de l’urne, et de les remettre à chaque personne dont on appellerait le nom. Quand arriva le tour de Maltravers, le bandeau ne cacha ni la rougeur ni le sourire de la divinité enchanteresse ; et la main de l’aspirant tressaillit en touchant la sienne.

Les enfants firent retentir l’air de bruyants éclats de rire lorsque Cécile remit gravement à Maltravers le plus mauvais de tous les lots : un ruban bleu, que Sophie pourtant convoita, et demanda avec insistance ; mais Maltravers ne voulut pas s’en dessaisir.

Maltravers resta toute la journée au presbytère, et prit part au bal. Oui ! il dansa avec Éveline ; lui, Maltravers, qui n’avait pas dansé depuis l’âge de vingt-deux ans ! La glace était complètement rompue ; Maltravers était tout à fait à l’aise chez les Merton. Et lorsqu’il reprit, solitaire, le chemin de sa solitaire demeure, qu’il repassa le petit pont, et traversa le bois aux ombrages épais, étonné peut-être de ce qu’il avait fait, tous les convives du presbytère, depuis le plus jeune jusqu’au plus vieux, le déclarèrent charmant. Caroline eût peut-être été froissée, quelques mois plus tôt, de ce qu’il n’avait pas dansé avec elle ; mais maintenant son cœur, quel qu’il fût, était préoccupé d’une autre image.