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Page:Bulwer-Lytton - Ernest Maltravers.pdf/376

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férées par un homme, m’auraient poussé à commettre le crime d’homicide ? jamais !

— Bah ! bah ! des paroles de femme, autant en emporte le vent ! Ne renoncez pas à une si belle alliance pour une pareille bagatelle.

— Est-ce que vous aussi, monsieur, vous oseriez m’imputer des motifs mercenaires ?

— Le ciel m’en préserve ! Vous savez bien que je ne suis pas un lâche ; mais en vérité, je ne veux pas me battre avec vous. Voyons, soyez raisonnable.

— Je ne doute pas que vous ayez de bonnes intentions ; mais cette rupture est définitive ; toute allusion à ce sujet serait pénible et superflue. Il faut que je vous souhaite le bonsoir.

— Vous êtes tout à fait décidé ?

— Tout à fait.

— Même si lady Florence vous faisait amende honorable ?

— Lady Florence ne pourrait rien faire qui ébranlât ma résolution. La femme qu’un homme honorable, un gentilhomme anglais, prend pour compagne de sa vie, ne doit jamais prêter l’oreille à un mot flétrissant pour l’honneur de son mari ; cet honneur est le sien ; et si les lèvres qui devraient le consoler des attaques de la médisance, ne servent qu’à propager la calomnie contre lui, en vain elle serait belle, douée, riche, noble, c’est une malédiction qu’il prend entre ses bras. J’ai échappé à cette malédiction.

— Et je dois dire cela à ma cousine ?

— Comme vous voudrez. Et maintenant arrêtez, Lumley Ferrers, et écoutez-moi. Je ne vous accuse, ni ne vous soupçonne ; je ne désire pas pénétrer au fond de votre cœur, et, dans la circonstance actuelle, je ne puis sonder vos motifs ; mais s’il est arrivé que vous ayez, en quoi que ce soit, alimenté les opinions injurieuses à ma foi et à mon honneur qu’a laissé échapper lady Florence, vous vous êtes chargé d’une lourde responsabilité, et tôt ou tard nous aurons un compte à régler ensemble.

— Monsieur Maltravers, la réputation de ma cousine ne peut être un sujet de querelle entre nous, autrement nous ne nous séparerions pas maintenant sans nous préparer à une rencontre moins amicale ; je saurai supporter vos paroles. Moi aussi, quoique je ne sois pas un philosophe, je sais pardonner. Voyons, mon ami, vous êtes échauffé, c’est très-naturel ; séparons-nous sans rancune ; votre main.