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Page:Bulwer-Lytton - Mon roman, 1887, tome 1.djvu/309

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LIVRE V.


CHAPITRE I.

Une grande vente de livres devait avoir lieu dans une maison de campagne, située à une journée de distance de Londres. M. Prickett avait l’intention d’y aller et d’y faire des achats pour lui et pour plusieurs gentlemen qui lui avaient donné des commissions ; mais, le matin du jour où il devait partir, il reçut la visite de sa vieille et terrible ennemie, la goutte. Il pria Léonard de le remplacer à la vente. Léonard y alla et resta absent pendant les trois jours qu’elle dura. Il revint assez tard le troisième jour, et se rendit immédiatement chez M. Prickett. La boutique était fermée ; il frappa à la porte des appartements particuliers ; une personne étrangère lui ouvrit, et, en réponse à la question de Léonard, qui demandait si M. Prickett était chez lui, lui dit avec un visage lugubre :

« Jeune homme, M. Prickett senior est parti pour son éternel séjour ; mais M. Richard Prickett vous recevra. »

En ce moment, un homme à l’air grave, aux cheveux rares, ouvrit une porte en disant :

« Entrez, monsieur ; vous êtes le commis de feu mon oncle, monsieur Fairfield, je suppose ?

— Feu votre oncle ! Quoi donc ? M. Prickett serait-il mort depuis que j’ai quitté Londres ?

— Mort subitement, monsieur, hier soir, d’une maladie de cœur. Le docteur pense que la goutte a atteint cet organe. Mon oncle n’a eu que fort peu de temps pour faire ses préparatifs de départ, et ses livres de comptes sont dans un grand désordre. Je suis son neveu et son exécuteur testamentaire. »

Léonard avait suivi le neveu dans la boutique. Le bec de gaz y brûlait toujours ; elle paraissait plus triste et plus sombre encore qu’à l’ordinaire. La mort fait toujours sentir sa présence dans la maison qu’elle visite.

Léonard fut vivement affecté, surtout en voyant le peu de chagrin manifesté par le neveu. Il faut dire que le défunt ne vivait pas en fort bons termes avec ce neveu, son héritier, qui était aussi libraire.

« Vous n’étiez engagé qu’à la semaine, d’après ce que je vois dans les papiers de feu mon oncle. Il vous donnait une guinée… c’est