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Page:Burke Edmund - Recherche philosophique sur l origine de nos idees du sublime et du beau - 1803.djvu/110

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DU SUBLIME

tremblement de terre, quoiqu’assuré d’être lui-même à l’abri de tout danger. Mais supposons ce funeste accident arrivé, quelle foule accourrait de toutes parts pour contempler ses ruines, et dans le nombre, combien ne s’en trouverait-il pas qui jamais n’auraient conçu le désir de voir Londres dans sa gloire ! Il n’est pas moins faux que le délice que nous sentons à la vue d’un malheur réel ou fictif, naisse du sentiment de notre sécurité ; je n’aperçois rien de semblable dans mon ame. Cette méprise me paraît venir d’un sophisme qui nous jette fréquemment dans l’erreur ; il consiste en ce que nous n’établissons aucune distinction entre ce qui est une condition nécessaire pour que nous fassions ou souffrions quelque chose en général, et ce qui est la cause de quelque acte particulier. Si un homme me tue d’un coup d’épée, c’est une condition nécessaire à cela que nous ayons tous deux été en vie avant le fait ; et cependant il serait absurde de dire que notre existence est la cause de son crime et de ma mort. Ainsi il est certain que ma vie doit nécessairement être hors de tout péril imminent pour que je puisse trouver un délice dans les souffrances réelles ou imaginaires de mes semblables, où réellement dans toute autre