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Page:Burney - Evelina T2 1797 Maradan.djvu/192

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dames à s’intéresser au succès de son pari, et, en vrai joueur, il exigea qu’elles se déclarassent avant que d’avoir vu les champions. Lady Louise seule goûta sa proposition ; madame Selwyn lui fit entendre qu’elle ne parioit jamais contre ceux à qui elle souhaite la victoire ; et madame Beaumont ne voulut être d’aucun parti. Quant à moi, je fus passée sous silence, selon la coutume de mylord Merton : rien de plus marqué que la grossièreté avec laquelle il se conduit envers moi sous les yeux de lady Louise.

Pour vous prouver qu’il n’y a que la prudence de cette dame qui le tient en respect, je vous ferai part d’une anecdote qui ne date pas plus loin que d’aujourd’hui. J’étois restée ce matin dans la salle à visites, quand le hasard y a amené mylord Merton ; il s’attendoit à y trouver sa future, et déjà il lui adressoit la parole ; mais me voyant seule, il n’eut rien de plus pressé que de se tourner vers moi, en me demandant où tout le monde étoit allé ? Je lui répondis brièvement que je n’en savois rien. Alors fermant la porte, il s’avança avec un air et une politesse bien différens de ses manières ordinaires, et me dit : « Que je suis aise, ma belle enfant, de pouvoir