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Page:Burney - Evelina T2 1797 Maradan.djvu/89

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mais à moi-même, si cela se pouvoit. Venons au fait, puisqu’il faut parler.

En vérité je ne sais comment m’y prendre pour vous l’expliquer ; j’essaie vingt tours de phrase, et aucune ne veut se prêter à mes idées ; je fais un effort pour entrer en matière.

Ah ! miss Mirvan, eussiez-vous jamais cru qu’un homme qui sembloit être formé pour servir de modèle, — qui approchoit de la perfection, — qu’un homme d’une politesse achevée, — d’une douceur de mœurs au-dessus de toute comparaison, — l’eussiez-vous cru, miss Mirvan, qu’un mylord Orville, auroit pu me traiter avec indignité ?

C’en est fait ! jamais je ne m’en fierai aux apparences, — jamais je n’en croirai mon foible jugement, — jamais je ne me persuaderai que, pour être homme de bien, il suffit d’être aimable. Quelles maximes cruelles la connoissance du monde n’inspire-t-elle pas ! — Mais, tandis que je m’abandonne à mes réflexions, j’oublie que je vous ai laissée en suspens.

J’avois précisément achevé la dernière lettre que je vous ai écrite de Londres, quand la servante du logis m’apporta un billet. Le laquais qui le lui avoit