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Page:Burnouf - Introduction à l’histoire du bouddhisme indien.djvu/297

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DU BUDDHISME INDIEN.


réunir de nouveau ; et alors, formant une véritable Assemblée religieuse, ils s’interrogeaient mutuellement sur les divers points de doctrine qu’ils avaient médités pendant cette sorte de retraite. Tout porte à croire que cet usage fut introduit par Çâkya lui-même, ou très-certainement par ses premiers disciples ; mais quand même il n’aurait pas encore été pratiqué du vivant du Maître, il n’en est pas moins si fréquemment rapporté dans les légendes exclusivement relatives à Çakya, que je n’hésite pas à le tenir pour très-ancien.

C’est là, si je ne me trompe, une des circonstances qui durent favoriser le plus l’organisation des Religieux en un corps régulier. Un des premiers résultats qu’elle dut produire fut l’établissement des Vihâras, sortes de monastères, situés dans des bois ou dans des jardins, où se réunissaient les Religieux pour assister à l’enseignement du Maître. Il ne faudrait pas croire cependant que les Vihâras fussent, dans le principe, des établissements où les Religieux s’enfermaient pour toute leur vie ; ils étaient si peu astreints à s’y fixer pour toujours, qu’ils en sortaient, comme je le disais tout à l’heure, au moment de la saison pluvieuse, c’est-à-dire à l’époque de l’année où il semble qu’ils dussent venir s’y rassembler, comme l’usage s’en est établi plus tard chez les peuples convertis au Buddhisme. Aussi les Vihâras n’étaient-ils, au commencement, que des lieux de séjour temporaire ; c’étaient, suivant l’étymologie du mot, les endroits où ils se trouvaient ; et l’origine de ce terme se montre dans la formule même qui ouvre chaque Sûtra : « Un jour Çâkya se trouvait (viharati sma) en un tel lieu[1]. » La première destination des Vihâras, après celle de servir d’asile aux Religieux, était de s’ouvrir aux ascètes voyageurs et aux étrangers qui venaient dans le pays. « N’y a-t-il pas dans ta patrie, dit le

    saison des pluies, depuis la pleine lune de juillet jusqu’à celle de novembre. » Pendant cette partie de l’année, les Religieux devaient cesser leurs pèlerinages et se livrer à des pratiques religieuses dans des lieux fixes. (Mahâvanso, Index, p. 28. Journ. Asiat. Soc. of Beng., t. VII, p. 1000. Clough, Singh Diction., t. II, p. 632, col. 2) Mais cette institution s’est modifiée avec les progrès de Buddhisme ; et par exemple aujourd’hui, chez les Buddhistes d’Ava, c’est dans leurs monastères, et non chez les particuliers, que les Religieux passent le temps de la saison des pluies. (Sangermano, Descript. of the Burm. Emp., p. 92, éd. Tandy.) (Voy. les additions, à la fin du volume.)

  1. On peut voir dans Georgi (Alphab. Tib., p. 407) la représentation et la description d’un Vihâra complet, tel qu’on pouvait en construire aux époques les plus florissantes du Buddhisme, et tel qu’on en construit encore au Tibet. Je pense qu’il ne serait pas impossible de trouver aujourd’hui dans l’Inde des modèles plus ou moins parfaits de ces édifices, que nous ont conservés les célèbres cavernes du Guzurate et du pays Mahratte. Ainsi je ne puis m’empêcher de croire que la caverne de Magatanie décrite par Salt est un Vihâra creusé dans le roc. (Transact. of the lit. Soc. of Bombay, t. I, p. 44.) Erskine n’avait pas hésité à exprimer la même opinion. (Trans. of the lit. Soc. of Bombay, t. III, p. 527.) Ce judicieux auteur a depuis longtemps remarqué, à l’occasion des grottes d’Éléphanta, qu’on doit d’ordinaire trouver attaché aux temples buddhiques