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Page:Cérésole - En vue de l’Himalaya.djvu/106

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à table ? Ne lui dira-t-il pas au contraire : Prépare-moi à dîner, ceins-toi et me sers jusqu’à ce que j’aie mangé et bu ; après quoi tu mangeras et boiras toi-même. Et parce que ce serviteur fait ce qui lui était commandé, son maître lui doit-il de la reconnaissance ? De vous, il en est de même : quand vous aurez fait tout ce qui vous était commandé, dites ceci : Nous sommes des serviteurs inutiles ; ce que nous avons fait, nous avions le devoir de le faire ».

Le miracle s’accomplira certainement à la longue si nous avons la foi, si nous tenons ferme et manifestons cela en servant au moins aussi complètement l’« Éternel » que nous savons servir notre mince intérêt dans les conditions plus ou moins dures ou injustes — mais acceptées naturellement — de la vie courante. J’ai télégraphié cette référence biblique à Berne. La stupéfaction aura peut-être été très grande parmi nos amis de me voir procéder comme le président Kruger par citations bibliques télégraphiées, et grande peut-être aussi la difficulté de comprendre ce que je voulais dire !

Ces paroles du Christ me paraissent une réponse et un avertissement sévères à ceux qui prétendent servir la pauvre humanité en caressant avec indulgence ses « revendications ». Il n’y a qu’une revendication légitime : ne plus servir de faux dieu y compris soi-même, mais servir Dieu, — à supposer qu’on comprenne ce que ce nom veut dire. J’ai l’impression aussi que tout notre service vit et vivra de cette conviction seule. Organiser, certes, est bien et indispensable, mais à condition que tout le règlement d’organisation soit dominé par la même conviction que ces mots du Christ expriment avec un relief extraordinaire, — et avec l’apparence de « justifier » le patron, le bourgeois qui exploite ses domestiques. Le but final et la vraie affaire ne sont pas de délivrer le paysan du zamindar, l’ouvrier du capitaliste,