Page:Cérésole - En vue de l’Himalaya.djvu/73

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À peine sortis de la cour du Mohant, nous entendons tout un carillon édifiant. L’Éternel qui a fait savoir aux enfants d’Israël qu’il était fatigué de leurs sacrifices, risque bien de nous informer (par des moyens plus cuisants encore que les imprécations des prophètes) qu’il est profondément dégoûté aussi de ces sonneries de cloches, grêles chez le zamindar religieux ou largement redondantes chez les nations « militaires-chrétiennes… ».

Tout près de Châprat, nous passons près d’une hutte où une jeune fille prépare le maïs sauté et P. a la malheureuse idée de vouloir lui en acheter pour notre repas de midi. Il passe quelques « pies » à quelqu’un pour qu’on remette cette monnaie à la jeune fille, mais avec ce maïs délicieux tout frais sauté, lui reviennent ses « pies » par retour du courrier. Nous aussi, nous bénéficions de la bonté de ces pauvres gens et nous n’avons pas même battu du tambour ni sonné la moindre sonnette pour leur bénéfice. Il est probable que cette jeune femme ignorait aussi ce que nous venions faire dans ces villages…

Devant les deux à trois cents figures qui se pressaient autour de nous au marché de Dharampur où P. a pu communiquer à plusieurs villages à la fois la bonne nouvelle du déménagement en lieu sec, j’ai été saisi une fois de plus — je dois avoir dit ça au moins une demi-douzaine de fois — de l’extrême beauté du regard — beauté et bonté — de plusieurs de ces hommes jeunes et vieux, groupés et serrés autour de nous. Beauté fréquente, presque constante du regard, au moins aussi fréquente que la splendeur régulière de leurs levers et couchers de soleil toujours réussis, jamais ratés. Singulier qu’avec ces belles expressions, ils aient en fait si souvent des défauts qui ne s’accordent pas avec elles, par exemple un respect assez médiocre pour la vérité.