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Page:César - Au moulin de la mort, 1892.djvu/45

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— Il le faut, te dis-je ! Pourquoi te cacherais-je ce qui ne tardera pas à arriver ? Tu as déjà une assez grande connaissance des choses de ce monde pour comprendre qu’un jour ou l’autre nous devons payer notre tribut à la nature. Ah ! je te l’avoue, c’est un vif chagrin pour ta mère de s’en aller à présent, sans emporter la douce certitude que mon Maurice sera heureux ! Que ne puis-je te laisser la fortune de ton père, la situation qu’il occupait dans la société, le château où nous avons passé ensemble des jours si beaux, mais d’une si courte durée ! Non, je n’ai plus rien de tout cela ! La révolution, comme un vent de tempête, a tout détruit. Ah ! je devrais les maudire, les hommes qui ont ainsi bouleversé mon existence ; pourtant je ne le fais pas, car, dans cette destruction des choses de l’ancien temps, ils espéraient jeter les germes d’un monde nouveau. Ils ont peut-être réussi, je n’en sais rien, mais toi, mon Maurice, tu l’apprendras bientôt. Veuille Dieu que ce ne soit pas à tes dépens ! On ne peut pas changer le passé ; ce qui a été établi subsiste et subsistera longtemps encore, je le crois : il faut donc t’habituer aux conditions nouvelles de notre époque et oublier ce que nous