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la terre ancestrale

quines le jour. Peu à peu, par en bas, comme montant de la terre, comme un gaz de plus en plus sombre qui s’en échapperait, l’obscurité recouvre la campagne, s’élève, atteint le firmament, et de la noirceur sortent les étoiles. Les sons, moins nombreux que les bruits du jour, sont par cela même et par l’air moite, rendus plus perceptibles.

Dans le silence, on entend le coin-coin des canards sur l’étang. Les oies qui pataugent dans la mare, pour appeler peut-être leurs congénères sauvages et invisibles, jettent leur cri « mohak, mohak ». À cet appel, les jeunes gens couchés dans l’herbe, rêvent aux palmipèdes libres qu’ils chasseront à l’automne.

Avant le sommeil, les muscles sont déjà détendus. Le fermier et sa famille désirent déjà le lendemain et son labeur, le lendemain qui réveillera des personnes joyeuses, à l’esprit lucide et large comme les horizons que leurs yeux contemplent.

***

C’est par une telle journée, que Delphis Morin, fièrement assis au volant d’un Ford nouveau modèle, se dirigeait vers Trois-Pistoles. De plus en plus, son rêve devenait une réalité ; ses ruses, ses fourberies paraissaient lui assurer la victoire. Depuis longtemps il travaillait à atteindre