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la terre ancestrale

— On les envoie promener les vieux. Tu es majeur, je pense. S’imaginent-ils que nous allons lécher leurs talons pendant toute notre existence ? Ils ont organisé leur vie à leur guise, nous avons bien le droit d’agir comme eux. Après tout, le père, s’il veut s’entêter, tu n’as qu’à le planter là et à partir en cachette. Ah mon pauvre garçon ! Si tu avais vécu à la ville comme moi, le bonhomme ne te dérangerait pas beaucoup.

— Ce n’est pas encore la principale raison, Delphis ; mais je sais que mon départ leur causerait une grande peine, à la maison.

— Ils feront comme tout le monde, ils se consoleront. Seras-tu esclave toute ta vie à cause de leur entêtement et de leurs caprices ? Qu’ont-ils à dire contre la ville ? Ils ne la connaissent pas, ils n’y ont jamais été, ils ne sont jamais sortis de leur coquille. Je suis certain que quand tu leur écriras pour leur vanter ses attraits, ils iront te rejoindre.

— Ah pour ça : non. Tiens, vois-tu ce gros érable ? Peux-tu le déraciner ?

— Non.

— Eh bien ! mon ami, c’est encore plus facile que d’arracher mon père de ses champs.