Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/374

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à quelque degré qu’elle soit descendue d’impudeur et de cruauté. Qu’on regarde bien les lèvres du bourreau tout injectées de sang, le visage blême du fossoyeur, et ses yeux éteints, entourés d’un cercle livide ; qu’on observe la contenance embarrassée de ces deux hommes et la sombre expression de leurs physionomies quand ils se trouvent en présence des autres ; qu’on ose chercher leurs âmes dans leurs prunelles de faucon et de chat-huant…

Et qu’on me dise si ces gens-là ne sont point bourrelés de remords, poursuivis par d’atroces terreurs, réveillés chaque nuit par des apparitions dégoûtantes, dégouttantes de sang !

L’Enfer est sur la Terre !

Et cependant ils ne sont pas plus coupables que ces animaux soigneux qui recouvrent de terre les dépouilles putréfiées des leurs. Il ne faut pas confondre plus longtemps ceux qui enterrent avec ceux qui tuent. Le fossoyeur et le bourreau sont les plus à plaindre de tous les êtres qui portent un cœur sous la mamelle. D’autres perçoivent le prix du sang, d’autres s’engraissent du suc des chairs ; il ne leur reste à eux que l’écume de la liqueur qu’ils versent, que la fange des fossés qu’ils creusent. Ils sont damnés dans leurs personnes, et condamnés dans leurs races à l’éternité de la peine et de l’infamie.

Ceux qui tuent, ceux qui vivent de la mort des autres, le sachant, le voulant, ceux qu’il faut traîner devant le tribunal de l’opinion par le pan de