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Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome III.djvu/455

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d’aliénation mentale, de tous les états du roi de Piémont, y compris Chypre et Jérusalem. Donc vous m’avez défendu la Suisse, la Belgique et la République de Saint-Marin. Parbleu, ce sont de bien grands exploits, et vous me croyez certainement fort embarrassé, fort mal à l’aise où je suis.

Oh que sots vous êtes ! Et qu’est-ce que cela peut me faire que vous m’interdisiez tout l’Occident, et tout l’Orient encore ? Il vous en restera la honte : voilà tout. Est-ce que l’air n’est pas le même sous tous les cieux ? Est-ce que le monde ne s’étend pas devant moi tout de long et de large, avec ses villes grandes et ses hameaux paisibles ? Est-ce que je ne suis pas toujours là même où vous voudriez le moins que je fusse ? Est-ce que je n’ai pas tous les noms imaginables à ma disposition ? Est-ce que vos passeports sont faits pour des Iroquois ? Est-ce qu’il ne faut pas que je vive quelque part, au bout du compte ? Est-ce qu’on ne trouve pas partout des caractères d’imprimerie ? Et si vous me poussiez ainsi jusqu’aux rivages des Océans, est-ce que l’Amérique n’est pas à douze jours de l’Europe, l’Amérique plus libre que ce vieux continent qui se fendille sous mes pieds ?

Si j’étais obligé de traîner un parti après moi, si je me tenais à l’affût de je ne sais quelle réputation bâtarde, si je ressemblais à tous ces imbéciles qui ne savent rien faire par eux-mêmes, je vous comprendrais encore. Mais comment voulez-