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Page:Cahiers de la Quinzaine - Série 15, cahiers 4-6, 1914.djvu/129

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ÈVE


Et moi je vous salue ô première fermière.
Vous avez tant compté les poules et les œufs.
Vous avez tant versé sur la race première
Le vain débordement de vos futiles vœux.

Et je vous aime tant ô première pauvresse,
Première assujettie à la loi de la mort,
Et première exposée à la loi de détresse,
Et première exposée aux coups d’un nouveau sort.

Et je vous aime tant ô mon âme, ô ma mère,
Première assujettie aux lois de pauvreté,
Première assujettie à la loi de misère,
Première assujettie aux lois de liberté.

Et je vous aime tant, aïeule inaltérable,
Première assujettie à la loi de tendresse,
Qui dans cet abandon et dans cette détresse
Périssez la dernière et la plus misérable.

Et je vous aime tant, aïeule invulnérable,
Première assujettie aux lois de servitude,
Qui parmi tant d’offense et tant d’inquiétude,
Demeurez la dernière et la plus misérable.