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Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/26

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manger le nez autour du râtelier d’un État démocratique toujours trop peu garni et nous continuerons à décliner lentement, en proie à d’obscures et misérables luttes de partis faméliques, sans grandeur ni noblesse, jusqu’au moment où la botte de quelque Guillaume II viendra mettre entre nous la plus honteuse des paix, celle de la servitude étrangère.

Décadence bourgeoise, décadence ouvrière, décadence nationale, tout se tient. Vous-même l’avez dit souvent, cependant, nous l’avons tous dit, socialistes d’origine marxiste ou purs syndicalistes proudhoniens : l’activité ouvrière est liée à l’activité patronale ; le socialisme ne peut se développer ni se réaliser dans un pays en décadence économique, où la grande industrie est peu développée et où continue à végéter une petite bourgeoisie timorée et rétrograde ; un prolétariat hardi et vraiment révolutionnaire ne peut exister que s’il a en face de lui une bourgeoisie également hardie et révolutionnaire. C’était là la conclusion de ce livre magistral : les Réflexions sur la violence, qui restera le plus bel effort pour constituer au mouvement ouvrier une idéologie supérieure et digne de lui. Eh bien ! toutes ces conditions sont-elles réunies Avons-nous cette bourgeoisie entreprenante et audacieuse, prenant la tête du progrès technique et économique ? Avons-nous une grande industrie prospère et largement développée ? Avons-nous une vie syndicale et ouvrière d’un essor correspondant ? Non, vous le savez bien, nous n’avons rien de tout cela ; nous avons une bourgeoisie banquière qui prête à l’univers entier, sauf à la France même et qui laisse notre outillage économique dans le plus déplorable état de stagnation nous avons un État hypertrophié, produit d’une démocratie rurale et urbaine, quémandeuse et famélique, ne demandant que