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Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 5-6, 1912.djvu/66

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plus profonde, ont exclu de leurs nouvelles conceptions de la vie la rouerie dans les affaires et la moralité dans la vie privée. Pleins de scrupules moraux hérités de leurs pères bons catholiques, ils n’ont pas osé se « libérer » complètement. En politique, ils sont devenus libéraux, mais sont demeurés attaches à un patriotisme auquel ils ont ajouté d’ailleurs quelques conditions qui le rendent inefficace ; en religion, ils se sont « libérés » de la connaissance traditionnelle des dogmes et sont devenus modernistes ; en morale pratique, ils sont devenus d’autant plus moralistes qu’ils se détachaient plus des commandements dogmatiques ; en économie industrielle et commerciale, ils admirent surtout les étrangers, particulièrement les Américains dont l’activité leur parait la forme la plus haute de la vie humaine ; en économie sociale, ils ont inventé une espèce de philanthropie à forme chrétienne qui les entraîne à « aller au peuple ». Ils se regardent comme des révolutionnaires et ils tirent de cette vue une grande fierté. En fait, ce sont des conservateurs impuissants qui essayent de faire accepter par leurs ennemis, en prenant leurs couleurs politiques et sociales, une vie chrétienne et française réduite à des vagissements. Ouvriers et employés, ce sont d’honnêtes garçons incapables d’exercer une résistance sérieuse au capitalisme ; patrons, ce sont de braves gens qui aimant à s’entendre dire qu’ils ont de beaux sentiments, mais qui ne dépassent guère, dans leur philanthropie, l’expression de ces beaux sentiments et qui montrent peu d’empressement à augmenter les salaires de leurs employés ou de leurs ouvriers. Il y a chez eux un gaspillage énorme de salive, d’encre et de flux contimentaux, quelquefois même de vraies forces intellectuelles, vitales. Inconsciemment, ils participent à la désorgani-