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Page:Calderón - Théâtre, trad. Hinard, tome II.djvu/72

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LE PIRE N’EST PAS TOUJOURS CERTAIN.

léonor.

Ô mon bien ! mon âme ! ma vie !

don carlos.

Mon mal ! ma perte ! ma mort !

léonor.

Si je l’ai vu la nuit du balcon, que la foudre m’anéantisse à l’instant !… et si, lorsqu’il me parla, je savais…

don carlos.

Faussetés que tout cela.

léonor.

Si cela n’était pas la vérité, je n’aurais point dit à Béatrix ce que je lui ai dit.

don carlos.

Eh ! mon Dieu ! vous saviez que je vous écoutais.

léonor.

Comment aurais-je pu le savoir ?

don carlos.

Vous m’aviez sans doute vu me cacher… et la preuve c’est que quand votre père est entré, vous êtes accourue où j’étais pour vous placer sous ma protection.

léonor.

Ç’a été l’effet du hasard… Mais supposons qu’il en soit comme vous prétendez : pourquoi, lorsque vous-même voulez me marier à don Diègue, pourquoi le refuserais-je ?

don carlos.

Demandez-le, si vous voulez, à toutes les femmes qui trompent deux hommes à la fois !

léonor.

Je ne suis pas une de ces femmes.

don carlos.

Vous vous ressemblez toutes.

béatrix, du dehors.

Léonor ?

léonor.

Béatrix m’appelle.

don carlos.

Si vous voulez m’obliger, ne dites pas que je suis ici.

léonor.

Soyez tranquille… Enfin vous ne voulez pas me croire ?

don carlos.

Non… car le proverbe dit que le pire est toujours certain.

léonor.

Moi je ferai changer le proverbe, et l’on dira que le pire n’est pas toujours certain. — Ah ! Carlos, combien tu me coûtes !

Ils sortent.