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Page:Calmettes - Leconte de Lisle et ses amis, 1902.djvu/131

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affaires, naturellement éloigné des chiourmes du labeur et réduit à la correspondance du journal de Saint-Denis, à quelques articles et trois traductions grecques, il était loin de pouvoir payer de coûteuses toilettes ? Il n’en aurait peut-être point payé du tout, sans une pension qui lui fut allouée par le Conseil d’administration de son île au taux de dix-huit cents francs.

Ses intimes, que son mariage avait ramenés chez lui, devinrent les confidents de ses peines, qu’ils prirent au sérieux selon leurs tendances respectives. L’un d’eux, le cousin Foucque, était riche. À la suite de placements sur les journaux d’Hervé, « cet autre Bourbonien » comme disait dédaigneusement Leconte de Lisle, il se trouva réduit à six ou sept mille livres de rentes ; mais il en possédait alors cinquante ou soixante mille. Il avait une femme fort belle et qui même avait été le sujet d’un léger trouble pour Leconte de Lisle au temps de leur jeunesse ; elle était restée fraîche après avoir eu deux ou trois enfants, et M. Foucque était heureux, car son cœur était sincère. Il souffrait de voir que Leconte de Lisle ne tirât pas meilleur parti d’une valeur intellectuelle qui lui semblait à juste titre exceptionnelle. D’instruction petite, mais doué d’une âme obligeante, il multipliait ses prévenances, envoyait sa voiture chercher M. et Mme de Lisle, lorsqu’il les avait à dîner, et ne se croyait pas pour cela dispensé de toutes les autres manifestations d’intérêt. Si gracieuses qu’elles soient, de telles politesses n’augmentent pas un budget, et l’excellent M. Foucque s’ingéniait à méditer sur des combinaisons possibles qui permissent à Leconte de Lisle de s’enrichir. Or l’un des moments où la situation de Leconte de Lisle donna le plus à réfléchir à M. Foucque coïncida notamment avec le triomphe naissant de Thérésa. Après un échec à l’Alcazar, une fugue à Lyon, un retour moins inaperçu sur les tréteaux du petit café Moka, puis de l’Eldorado qui l’ex-