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Page:Cardan - Ma vie, trad. Dayre, 1936.djvu/353

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XLVIII

TÉMOIGNAGES D’HOMMES ILLUSTRES SUR MON COMPTE

Les témoignages les plus honorables qui aient été portés sur moi vinrent de quatre ennemis. Le premier fut (270) celui du célèbre Matteo Corti[1]. Interrogé par le Sénat sur le successeur à lui donner, il répondit que j’étais le meilleur possible et que je ne serais inférieur à aucune fonction et à aucune attente. Le second fut celui de Delfino, qui enseignait à côté de moi dans la deuxième chaire. Un jour, sur la place publique, devant ses élèves et en ma présence, quelqu’un disait que, si je partais, Montano occuperait la première chaire. À quoi j’ajoutai : « Le travail serait plus pénible pour toi à côté de quelqu’un si habile dans la brigue auprès des étudiants[2] ». Il répondit : « Pour ce qui est de la première place, je ne la céderais jamais, même si Galien enseignait. Mais je tiens qu’il est plus honorable pour moi d’être le second auprès de toi que d’être le premier avec un autre. Et je ne crois pas que ma besogne puisse être, avec personne, plus pénible qu’avec toi, puisque, malgré la faveur des principaux citoyens, celle de presque toute la ville et de tant d’autres personnages distingués, malgré même la liberté que j’ai obtenue pour les exilés, il ne m’a pas été possible d’arriver à réunir le tiers du nombre de tes étudiants. »

Camuzio, un autre collègue, a fait imprimer un livre où il se plaint vivement qu’à Pavie et dans d’autres universités on cite mon nom pour l’opposer à l’autorité de Galien[3], qu’on devrait me préférer sans hésitation parce que, à défaut d’autre motif, il est mort depuis si longtemps que la jalousie à son égard (271) est complètement éteinte, et qu’il a l’approbation de tant d’écrivains. Ce livre de Camuzio se trouve partout.

Sebastiano Giustiniani, vénitien, gouverneur de Padoue, homme avisé, curieux de belles-lettres, de philosophie et de théologie, et qui

  1. Voir chap. XIV.
  2. Ce devait être pratique courante puisque le Sénat de Milan était obligé de prendre des mesures pour y mettre un terme à l’université de Pavie. Le 4 janvier 1556, il faisait défense ne quis scholares praehenset, aut ambiat, uel sollicitet, ut Doctores audiat quos prachensator maluerit. (Mem. e doc. Pavia, II, p. 19, no XX).
  3. Dans la dédicace à Daniele Barbaro, patriarche d’Aquilée, des Disputationes (Cf. chap. XII, note 1) : Siquidem in hac Insubria nostra quamplures uideas non solum auditores uerum etiam iam din promotos ad lauream quos minime pudeat Cardanum contra Galeni placita ueluti physicum Appollinem in medium producere, idque non mediocri laborantium dispendio…