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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/414

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fectionner et son intelligence et sa culture, et plus il peut facilement disposer des machines à l’aide desquelles il obtiendra des revenus encore plus considérables. Si le marché est éloigné, il ne doit produire que les denrées qui supporteront le transport, et de cette façon il est borné dans sa culture ; et plus il est borné, plus rapidement il épuise la terre, moins est grand son pouvoir d’obtenir des rentes, de s’associer avec ses semblables, de perfectionner son mode de penser, d’acheter des machines ou de construire des voies de communication. C’est ainsi que les choses se passent, même lorsqu’il est forcé de vendre et d’acheter sur des marchés éloignés ; mais elles deviennent encore pires lorsque rien n’est restitué à la terre, ainsi que cela a lieu dans le cas de revenus payés à un propriétaire absent. La production diminue alors, sans une diminution correspondante dans la rente. Le pauvre travailleur se trouve alors chaque jour, et de plus en plus, à la merci du propriétaire du sol ou de son agent, et, de plus en plus, soumis à sa volonté. La proportion de la rente s’élève alors, mais sa quantité diminue. La valeur des denrées augmente, mais celle de l’homme diminue ; et, à chaque pas dans cette direction, nous constatons une tendance croissante à la dépopulation, telle qu’elle nous est apparue en Turquie, en Portugal, à la Jamaïque et surtout en Irlande.

On nous parle du principe de population en vertu duquel la quantité des individus s’accroît plus rapidement que celle des subsistances ; et, pour nous prouver que les choses doivent toujours se passer ainsi, on nous signale ce fait, que lorsque les individus sont en petit nombre, ils cultivent constamment les sols fertiles, et qu’alors les subsistances surabondent ; mais qu’à mesure que la population s’accroît, ils sont forcés de s’adresser à des sols ingrats au moment où les subsistances deviennent rares. Que le contraire de cela soit la vérité, c’est ce qui est démontré par l’histoire de l’Angleterre, de la France, de l’Italie, de la Grèce, de l’Inde et surtout par ce fait, que l’Irlande possède des millions d’acres du sol le plus fertile, qui demeurent à l’état de nature, et resteront probablement à cet état, jusqu’au jour où elles trouveront des marchés pour leurs produits, qui permettent à leurs propriétaires d’échanger les navets, les pommes de terre, les choux et le foin contre du drap, des machines et de l’engrais.

Il est singulier que l’économie politique moderne ait si complè-