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meurt de faim par milliers, par ce motif que, dans l’état actuel des routes, il n’y a que peu ou point d’échange des produits de la terre.

§ 5. — Perte du capital et destruction du pouvoir d’accumuler.

L’état de choses, que nous avons retracé plus haut, résulte nécessairement du maintien d’un système qui tend à l’annihilation du commerce par l’exclusion de la grande classe intermédiaire des artisans et des ouvriers, et qui réduit une grande nation à n’être plus qu’une masse de cultivateurs, d’un côté, et de l’autre, d’avides préteurs d’argent. La chaîne de la société manque ici complètement de ces anneaux qui la relient ; d’où il résulte qu’il n’y a plus ni mouvement, ni force. Le capital étant dissipé chaque semaine, dans une proportion plus considérable que la valeur des produits importés, il ne peut y avoir d’accumulation. « Personne, dit le colonel Sleeman[1], ne possède un fonds égal à la moitié de son revenu. » Partout les individus sont à la merci du produit de l’année, et, quelque faible qu’il soit, il faut acquitter les impôts ; et rien ne revient de ce qui est exporté. Le sol ne donne rien[2], et comme la condition des prêts que fait la terre à l’homme est violée chaque jour, chaque heure et généralement, on ne doit éprouver aucune surprise en lisant dans les volumes intéressants du colonel Sleeman les preuves nombreuses qu’il a offertes de l’infécondité croissante de la terre.

On a laissé tomber en ruine les ouvrages édifiés autrefois pour l’irrigation[3], et les terrains les plus riches sont abandonnés. Même dans la vallée du Gange, il n’y a pas un tiers des terres cultivables qui soit soumis à la culture[4] ; tandis qu’ailleurs, il apprend à ses lecteurs que sur la surface de l’Inde entière la moitié est inculte[5]. Dans la présidence de Madras, on ne cultive pas le cinquième du territoire[6], et cependant la famine sévit constamment,

    les ryots de pouvoir payer leur imposition foncière fixe. » (Chapman, Du Coton et du Commerce de l’Inde, p. 97.)

  1. Excursions dans l’Inde, t. 1, p. 205.
  2. Ibid., p. 768.
  3. Chapman. Du Coton et du Commerce de l’Inde, p. 91.
  4. Ibid., p. 22.
  5. Ibid., p.25.
  6. « Si un ryot creusait un puits, sa rente à payer était augmentée, s’il creusait un petit canal, elle était presque doublée. If n’y avait donc aucune possibilité d’amélioration. De plus, la terre étant partagée entre des paysans dont le travail était le seul capital, deux mauvaises saisons les réduisaient presque à la famine,