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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/443

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laisser ses sujets travailler à produire le sucre, ou à confectionner des tissus, et c’est en suivant cette marche qu’elle peut se procurer l’assistance dont elle a besoin.

Les habitants de la Jamaïque n’ayant jamais eu la permission d’appliquer leur travail de réserve même à raffiner le sucre, sont obligés de l’exporter à son état le plus grossier ; et plus ils en expédient, plus le prix est bas et plus est considérable la proportion prélevée par le gouvernement ; mais le malheureux nègre est ruiné. L’Espagne, au contraire, permet aux habitants de l’île de Cuba de s’appliquer à toute occupation qui leur paraît devoir fournir une rémunération à leur travail et à leur capital, et, comme conséquence nécessaire de ce fait, les bourgs et les villes s’accroissent ; et le capital se porte vers la terre qui, de jour en jour, acquiert plus de valeur. La faculté d’avoir recours à d’autres modes de travail diminue la nécessité d’exporter le sucre ; et lorsqu’il est exporté en Espagne, le producteur peut prélever à son profit personnel presque la totalité du prix payé par le consommateur, le gouvernement ne réclamant qu’un droit de quinze pour cent.

« Des masses immenses d’individus se corrompant dans une inaction forcée encombrent le sol de l’Inde[1], » parce que la porte de l’atelier est interdite à l’Hindou, ainsi qu’au nègre de la Jamaïque. S’il tente de convertir son coton en fil, son fuseau est taxé proportionnellement à tout le bénéfice qu’il pourrait lui procurer ; s’il tente de faire de la toile, son métier à tisser est soumis à une lourde taxe, dont est affranchi son riche concurrent Anglais. Son fer et sa houille doivent rester au sein de la terre, et s’il ose même recueillir le sel qui se forme en cristaux sur le seuil de sa demeure, l’amende et la prison sont la récompense de son travail. Il doit produire le sucre pour être exporté en Angleterre, et y être échangé peut-être contre du sel anglais. L’ouvrier paye le sucre arrivé dans ce pays probablement à raison de 40 schell. le quintal, sur lesquels le gouvernement réclame un tiers, l’armateur, le négociant, etc., un autre tiers, et le tiers restant doit être partagé entre les agents de la compagnie, qui veut percevoir l’impôt et le pauvre ryot, qui veut se procurer le peu de sel qu’il consommera pour assaisonner son riz, et quelques lambeaux du coton de son

  1. Chapman. Du Coton et du Commerce de l’Inde.