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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 2.djvu/262

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population et diminue les fonds sur lesquels il faut payer les instituteurs. » L’une voudrait développer les pouvoirs de la terre, et, par là, augmenter la richesse de l’homme. L’autre ferme les mines et les fourneaux et réduit l’homme à dépendre de la force musculaire humaine non assistée. » L’une cherche à apporter en aide à l’homme les forces naturelles, et ainsi, au moyen de l’intelligence, égaliser ceux qui diffèrent en pouvoir physique. L’autre vise à perpétuer l’inégalité, en forçant à la dépendance de la force musculaire. — L’une tend à donner au travail du présent un empire croissant sur les accumulations du passé ; l’autre à faire du travailleur un instrument dans les mains du capitaliste. — L’une voudrait maintenir les droits du peuple et des États. L’autre regarde le veto exécutif comme le palladium de la liberté et dénie le droit des États de décider s’ils veulent sanctionner l’existence de l’esclavage sur leur territoire. »Le bon et le mauvais principe, la décentralisation et la centralisation sont ainsi engagés dans un perpétuel conflit, et de là les « anomalies extraordinaires que présente le mouvement de la société américaine. À de courts et lointains intervalles, la première prend le dessus ; mais, pour l’ordinaire, la dernière croît en force

    dans d’autres n’avancent que peu. Voici plusieurs années que l’Allemagne s’adresse au Massachussets pour des machines pour la fabrication du drap, et c’est à peine s’il se fabrique une aune de drap dans les limites de l’Union. Plusieurs des plus importantes améliorations dans la fabrication cotonnière sont d’origine américaine, et néanmoins la quantité de filés de coton consommée ne dépasse que peu, si même elle dépasse, ce qui était nécessaire il y a huit ans. Il en est de même pour la soie, le lin et le fer. Dans les dernières dix années, la population a augmenté de huit millions ; et le chiffre des individus engagés dans toutes ces principales branches de fabrication n’est pas aujourd’hui plus élevé qu’alors. Le surcroît entier va forcément à l’agriculture et au négoce. La même cause tient l’agriculture abaissée — arrête son développement scientifique et la tient à un niveau inférieur à celui de l’intelligence développée dans les écoles. La capacité intellectuelle du pays est donc jetée forcément dans les opérations d’acheter et vendre des mots et des choses, d’où suit que l’offre de boutiquiers, de commis, d’hommes de loi, de docteurs et de spéculateurs en tout genre, est tellement en excès sur la demande. Le chiffre des producteurs grossit lentement, mais on voit grossir avec une vitesse extrême celui des hommes intermédiaires qui ont à faire supporter leur entretien par le travail de ceux qui produisent. Il en résulte une grande augmentation de crime et de l’esprit d’insouciance qui dispose à porter atteinte aux droits du prochain, tant au dehors qu’à l’intérieur. Le pouvoir d’être utile au monde s’accroît avec le développement de l’intellect, mais celui de lui faire tort s’accroît également vite. C’est dans cette dernière direction que tend l’esprit américain, et par la raison qu’il trouve obstacle à se mouvoir dans la direction contraire.