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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 2.djvu/299

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le monde. Le remède est à chercher dans l’adoption d’une politique en harmonie avec celle des pays avancés de l’Europe — une politique qui produise relation directe avec les consommateurs de tissu dans le monde, [1] — une politique qui ne tende point à forcer d’énormes offres de denrées brutes sur un marché unique, au détriment des fermiers d’Allemagne et de Russie et des producteurs de l’Inde — une politique qui tende à créer une agriculture savante, à augmenter la production[2] et à élever l’agriculteur lui-même — une politique enfin qui conduise dans la direction du commerce, au lieu de celle — suivie aujourd’hui qui est celle du trafic et de la guerre.

§ 18. — L’agriculture est la grande poursuite de l’homme. Venant à la suite de l’industrie elle est toujours la dernière à se développer. À mesure qu’elle devient une science, la société tend de plus en plus à prendre sa forme naturelle. — Le mouvement sociétaire devient plus régulier, — et l’homme gagne en bonheur et en liberté. L’économie politique moderne, qui enseigne l’inverse de ceci, est contraire dans toutes ses parties à la science sociale.

Dans la science, le lecteur l’a vu, c’est la branche la plus abstraite et la plus simple qui atteint son développement la première. Il en est ainsi pour les professions de l’homme. Le trafic et la guerre, abstraits et simples, entrent les premiers en scène. Les fabriques, ou les changements de formes mécaniques et chimiques, viennent après. La dernière de toutes vient l’agriculture ; et c’est alors que nous trouvons le fermier à qui devient nécessaire le plus haut degré d’éducation, et sa profession devenant celle qui tend le plus à développer l’intelligence, à améliorer le moral, à amender le cœur. À chaque pas du progrès dans cette direction, l’homme acquiert pouvoir accru sur la nature et sur lui même, — passant de la condition du misérable animal, vagabond sur la terre, cherchant en vain sa subsistance, à celle de l’homme cultivé, qui domine les forces de la nature et les contraint à travailler à son service. À chaque étape, la société va se développant de plus en plus, et l’homme devient de plus en plus apte à entretenir avec son semblable ce commerce qui est nécessaire pour le rendre apte à réaliser ses aspirations les plus hautes dans ce monde et vers l’autre.

L’économie politique moderne vise dans une direction qui est tout à fait inverse, — plaçant l’agriculture d’abord, et au rang le

  1. D’année en année les planteurs tiennent des assemblées ayant pour objet l’établissement d’un commerce direct et leur affranchissement de la taxe de New-York et de Liverpool ; et pourtant leur dépendance de ces ports s’accroît d’année en année. Placez l’usine à coton à côté du planteur et il sera libéré à l’instant de la taxe dont il se plaint si fort.
  2. La récolte d’œufs en France est évaluée par Royer, Statistique agricole, à 176.331.110 francs. » C’est le tiers de la récolte totale de coton de presque une douzaine d’États du Sud.