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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 2.djvu/359

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cueillir ses taxes en l’article le plus cher. En France, jusqu’ici, la tentative a échoué. Taxes, rentes et intérêts, montant à un chiffre énorme, ceux qui les reçoivent sont à la fois nombreux et puissants. Les recettes annuelles et les déboursements du trésor montant à 1.700.000.000 francs, tandis que la dette hypothécaire monte presque à la moitié, et que les rentes de maisons et de terres peuvent aller encore plus haut, nous avons un total de plus de 3.000.000.000 francs, à recueillir d’abord en monnaie, et puis à rediviser parmi les membres les plus influents de la société, — tous désireux de recevoir le plus cher des métaux précieux, au grand préjudice de ceux qui payent les taxes et de ceux qui ont besoin de payer pour l’usage de la monnaie.

L’abondance de l’or étant de tendance égalisante, ils voudraient répudier ce métal ; et pourtant le préjudice retomberait en définitive sur eux-mêmes. Une telle mesure ne pourrait manquer d’accroître considérablement la tendance, en ce pays, vers l’état de choses si bien décrit dans l’excellent petit livre de M. Coquelin, — l’état de fréquents chômages du travail, résultant de la difficulté de trouver acheteur pour ses produits, laquelle est partout une conséquence d’un déficit dans l’instrument de circulation. Ailleurs il rappelle à ses lecteurs l’adage français : « Le difficile n’est pas de produire, c’est de vendre. » Sans prendre cette assertion trop à la lettre, il dit qu’il est impossible de n’en pas reconnaître la vérité relative. « Assurément, continue-t-il, si la difficulté de vendre n’arrêtait pas les producteurs, ils seraient en mesure de porter l’émission de leurs produits bien au-delà de ses limites actuelles. Pas un sur dix ne produit tout ce qu’il peut. Pour tous, la grande question, c’est moins de produire que d’écouler leurs produits. » De là vient qu’il se trouve forcé de décrire la condition de l’ouvrier français « comme misérable. » — La difficulté, cependant, ne se borne pas à eux. Le malaise qui résulte de cet état de choses est général, et s’étend à toutes les classes de la société[1].

Le capital en travail et en terre existe, mais il est besoin d’une circulation qu’on ne peut obtenir qu’à l’aide d’une quantité suffisante de l’instrument qui sert aux échanges de la main à la main. « Ce qui manque réellement chez le cultivateur, dit M. Coquelin,

  1. Coquelin. Du crédit et des banques, p. 179.