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Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 3.djvu/136

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vrai que l’homme commence par les sols riches, cette autre proportion serait vraie aussi : que l’accroissement de population porte en lui la décadence du pouvoir de l’homme, et que l’homme devient de plus en plus victime de la nature. En commençant au contraire par les sols pauvres, il passe graduellement aux meilleurs, et à chaque nouveau pas s’accroît le pouvoir de choisir les sols qui répondent le mieux à ce qu’il se propose. Devenant graduellement maître de la nature et de lui-même, il prend une terre siliceuse ou la marne pesante, — l’argile ou la terre noire, — le fer ou la houille, — la pente d’un coteau ou le lit d’un fleuve, — une couche végétale mince ou profonde, — selon qu’il convient à ses besoins présents, et que cela peut l’aider dans la recherche d’un pouvoir plus étendu. Avec l’accroissement de population amenant la misère, le type de l’homme doit s’abaisser, il doit finir par tomber au-dessous du niveau de ce pur animal qui est le sujet dont s’occupe la science politique moderne. Si cet accroissement engendre au contraire la force, le type progresse vers le niveau du véritable homme mieux nourri, mieux vêtu, mieux logé, agissant mieux, pensant mieux, exerçant sur tous les actes de sa vie une volonté qui s’accroît à mesure que s’accroît l’empire qu’il exerce sur le monde matériel. À laquelle de ces deux classes de phénomènes appartient celui qui s’observe chez toutes les nations en progrès ? c’est ce que nous allons examiner.

La population totale de l’Angleterre et du pays de Galles, au XIVe siècle, ne dépassait pas 2.500.000 âmes. Les terres fertiles abondaient attendant l’appropriation aux mains de l’homme. Les terres pauvres cependant recevaient la culture et payaient peu le travail, — six ou huit boisseaux de blé par acre passaient pour le rendement moyen. Aujourd’hui la population est sept fois plus nombreuse, il y a dix fois plus de terre en culture, — comprenant tous les sols pauvres sur lesquels la nécessité aurait forcé d’appliquer une déperdition de travail, et cependant le rendement moyen par acre, en estimant la récolte en foin comme du bœuf et du mouton, et en calculant la récolte de pommes de terre et d’autres végétaux alimentaires, s’est accrue dans une proportion au moins égale à celle des acres cultivés en plus. Les famines étaient fréquentes et sévissaient rudement ; tandis qu’aujourd’hui l’on a cessé de les compter au nombre des chances possibles, — l’offre ayant gagné en