Aller au contenu

Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 3.djvu/272

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à l’harmonie qui existent partout ailleurs dans l’univers. Est-il présumable — est-il possible qu’on essaie de présumer — que l’opéra-tien du mécanisme vital demande à être protégée contre un vice inhérent en lui par le correctif d’une déperdition de ses propres produits ? N’est-il pas, au contraire, beaucoup plus probable que le haut degré de fécondité humaine, observé occasionnellement, est un degré qui suit nécessairement ce degré du progrès de la société où la sécurité est accrue au point que tous les membres n’ont plus à dépenser d’effort pour se protéger, et cependant n’ont encore que peu de demande pour leurs facultés au-delà de celles requises pour exécuter les rudes travaux des champs ? Prenons, par exemple, le cas de l’Angleterre. Déjà tolérablement peuplée au temps de César, sa population, à la fin du XIVe siècle, s’élevait à 2.400.000 âmes ; et cependant une simple famille qui se fût multipliée dans la proportion que l’école malthusienne indique comme la loi d’accroissement aurait donné, à cette époque, des milliers de millions d’âmes. Trois cents ans après, le chiffre est 5.134.000 ; — il a un peu plus que doublé dans ce laps de temps. Soixante ans plus tard (1760), il est de 6.500.000 ; l’accroissement a été de 30 % ; et cependant voici qu’à la fin d’une période un peu plus longue (1830), il a pleinement doublé. Il est clair que, dans tout ce temps que nous venons de passer en revue la faculté procréative a été une quantité très-variable ; — son montant dépend entièrement des changements de condition dans les habitudes, les manières, les mœurs, dont nous avons parlé. On peut dire cependant que la très-grande différence observée ici a sa cause dans l’accroissement de la durée de la vie, résultat d’une amélioration dans les quantité et qualité de nourriture, de vêtement, de logement, — le chiffre des naissances ayant été le même, et l’exercice du pouvoir procréatif, une quantité constante[1].

  1. Voici les calculs sur les changements de la durée de la vie dans les trois derniers siècles.
      « Dans la dernière partie du XVIe siècle, la moitié des enfants mouraient avant d’atteindre cinq ans — et la vie moyenne de la population entière était de dix-huit ans. Dans le XVIIe siècle, la moitié des naissances parvenait à l’âge de douze ans ; mais, dans les premières soixante années du XVIIIe, une moitié de la population parvenait à l’âge de vingt-sept ans. Dans les dernières quarante années, elle allait au-delà de trente-deux ans. Au commencement du présent siècle c’était à plus de quarante ans, et de 1838 à 1845, à plus de quarante-trois. » La longévité moyenne à ces