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Page:Carmontelle - Proverbes dramatiques, Tome 3.djvu/35

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Le MARQUIS.

Ton bonheur, l’amour réel ; c’est l’amour-propre, rien ne peut l’anéantir ; mais il est avide. Cherche à plaire à toutes, & tu plairas davantage à celle que tu aimes. Je veux même qu’on te croie infidèle, pour te rendre heureux.

Le CHEVALIER.

Tu crois que je consentirois ?…

Le MARQUIS.

Ta languissante Comtesse en sera plus vive, plus charmante ; elle feindra de vouloir se venger, tu riras de ses projets : que de moyens délicieux ! mais jamais d’explication réelle, toujours une sorte d’incertitude, du persifflage, point de raisonnemens suivis, d’assurances pesantes d’un éternel amour ; un continuel badinage, & voilà l’homme qui doit être aimé tout le temps qu’il aimera. Si, à la première inquiétude, tu dévoiles le motif de ta conduire, tu seras perdu & sans espoir d’un sincere retour ; elle cherchera à se venger, se vengera, & tu seras puni, non-seulement d’avoir eu le projet de changer de conduite, mais d’avoir eu l’imprudence de l’avouer.